par des canaux maritimes de transit, comme celui du Forth à la Clyde, ce doublement du canal calédonien, se heurtent à la double objection de l’énormité de la dépense et d’une moindre utilité. Sir Michaël Hicks-Beach, alors qu’il présidait le Board of Trade dans le cabinet de lord Salisbury, l’a fait observer avec beaucoup de justesse : ce sont là des entreprises privées. Il ne se trouverait pas un chancelier de l’Echiquier, whig ou tory, pour y engager les finances de l’Etat, c’est-à-dire, suivant les propres expressions de sir Michaël, the money of tax payers, l’argent des contribuables. Aussi peut-on s’attendre à ce que de tous ces projets, les Anglais n’exécutent que ceux qui présenteront des avantages certains.
Sur le continent, où l’on est moins respectueux de l’argent de l’Etat, où quelquefois les imaginations remplacent plus facilement les raisons positives par des rêves pour le moins nuageux, les inventeurs de canaux se sont donné plus libre carrière. Il s’en est trouvé pour vouloir transformer en ports de mer des villes qui n’avaient pour cela aucune des raisons décisives de Manchester ou même de Sheffield. — Nous avons, ici même, dit ce que nous pensions du Paris port de mer, dont on n’a encore pu démontrer les avantages, en face d’inconvéniens certains, ce qui n’empêche pas ce projet d’avoir eu l’honneur inattendu de figurer sur certains programmes électoraux, entre les trois-huit et la séparation de l’Église et de l’État. Rome et Cologne ont leurs projets de canaux maritimes, et j’ai reçu il y a quelques années une brochure intitulée : Vienne port de mer. L’auteur voulait, par des canaux de grande navigation, réunir la capitale de l’Autriche à l’Adriatique, à la mer Noire, et je crois même à la Baltique, sans trop s’inquiéter des plateaux de Bohême et de Silésie, obstacles colossaux qu’une entreprise plus modeste de navigation intérieure hésite aujourd’hui à franchir. Tous les projets ne sont pas, il faut s’empresser de le dire, comparables à celui-ci.
Quand Bruxelles et Louvain demandent à devenir des ports de mer, elle peuvent faire valoir leur proximité de l’estuaire de l’Escaut et, par suite, la dépense relativement faible qu’entraînerait la réalisation de leur désir. Il est cependant permis de demander si le grand port d’Anvers si parfaitement aménagé et desservi par le réseau à mailles serrées de la canalisation d’eau douce et des chemins de fer n’est pas déjà un débouché suffisant pour l’activité industrielle et commerciale de la Belgique. La question serait d’autant moins indiscrète que l’État belge, propriétaire et exploitant des chemins de fer, a participé, en outre, pour une très grosse somme à l’amélioration du port d’Anvers, et que les promoteurs des canaux brabançons lui demandent cependant de