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la maladie ; ce qui juge une fois de plus la façon dont le gouvernement anglais de l’Inde établit ses patentes.

En septembre 1891, deux autres navires anglais, le Marathon et le Redbreast, virent éclater le choléra à bord en rade de Bombay. En quelques jours il y eut 16 décès, et Bombay n’ayant le choléra qu’à l’état endémique délivrait patente nette.

Bombay est donc toujours fort suspect. Il le devient surtout quelques mois avant le pèlerinage du Hedjaz ; il est l’aboutissant à l’ouest du vaste réseau de chemins de fer qui y déversent les voyageurs de toutes sortes, pèlerins, commerça us, militaires, provenant de toutes les parties de la péninsule, du centre et des extrémités ; de l’Himalaya, de l’Asie centrale, de l’Afghanistan et de quelques points beaucoup plus rapprochés, comme Madras, Calcutta, Lahore, Peschawer. C’est à Bombay que les attendent et d’où vont, partir les grands steamers à marche rapide, dont le nombre augmente tous les jours, et qui vont les amener en dix, onze et douze jours dans la Mer-Rouge, à Suez et dans la Méditerranée.

Depuis une quarantaine d’années, la route du choléra venant de l’Asie vers l’Europe a changé, au moins en partie. Avant cette époque, l’itinéraire suivi était, nous l’avons vu, les plateaux de l’Iran, le sud de la mer Caspienne, l’Europe. Mais, comme l’homme abandonnait celle voie trop lente pour la voie de mer, le choléra, continuant à suivre les courans humains, franchit avec eux, en quelques semaines, les mers qui nous séparent des Indes. De ce côté, donc, la surveillance est nécessaire.

D’un autre côté, les événemens qui se sont passés en 1889, en 1890 et cette année même 1893, du côté du golfe Persique, montrent qu’il faudra aussi se préoccuper de défendre l’Europe dans cette direction ; surtout, comme nous le verrons dans une autre partie de cet article, lorsqu’un chemin de fer amènera en quelques jours les voyageurs du golfe Persique sur la Méditerranée. Actuellement, le choléra qui sévit le long des rives du Tigre, dans le vilayet de Bagdad, va probablement suivre la route qu’il a déjà parcourue, en 1889 et 1890 vers les vilayets de Mossoul, de Diarbekir et vers la Syrie.

Désormais donc, plus encore que par le passé, l’attention de l’Europe doit être appelée sur le danger permanent de ces deux grands prolongemens de l’océan Indien qui, à l’orient (golfe Persique) et à l’occident (Mer-Rouge) s’avancent connue deux, grands bras jusqu’aux portes de la Méditerranée, où ils permettent aux steamers d’apporter de Bombay et de tout l’empire anglo-indien, avec une entière vitesse, des marchandises précieuses, mais aussi des germes morbides. En ce moment, seule la Turquie est chargée