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chapelier 11 francs. L’atelier d’un charpentier à Bordeaux coulait annuellement 70 francs, celui d’un serrurier 54 francs. Tandis qu’à Paris une boutique du Palais dans la « salle des Merciers, » coûtait à son locataire 366 francs, un « étal à poissons, à Troyes, ne valait que 9 fr. 50, et une petite chambre d’étudiant avec cuisine s’obtenait à Rouen pour 10 à 12 francs. On acquérait souvent la propriété de ces chambres ; les ventes de partie d’un immeuble n’étaient pas rares au XVIIIe siècle.

Evelyn, durant son séjour à Paris en 1647, payait, rue du Colombier, ce qu’il appelle « un bel appartement meublé » 65 francs par mois, soit par an 780 francs ; il n’est pas probable toutefois qu’il ait eu à ce prix une installation bien luxueuse. Si les loyers de province en effet avaient pris, dès le XVIIe siècle, une importance beaucoup plus grande que ceux de la campagne, si les premiers avaient augmenté, depuis Henri IV jusqu’à la Révolution de 150 pour 100, au lieu que les secondes n’avaient haussé que de 50 pour 100, le loyer des maisons de Paris était monté, durant le même laps de temps, au sextuple de son chiffre primitif : de 600 francs en 1601-1625 contre 3 700 francs en 1770-1800 ; correspondant en capital à une valeur moyenne de 73 000 francs, dans le dernier quart du XVIIIe siècle, au lieu de 11 800 francs dans les premières années du XVIIe siècle.

Cette plus-value extraordinaire de la propriété bâtie se produisit surtout de 1601 à 1700. Elle eut pour cause à la fois le renchérissement des terrains et celui des matériaux de construction. Le progrès du luxe y joua son rôle, l’aisance accrue de la bourgeoisie parisienne, et aussi l’immigration dans la capitale d’une partie de la haute noblesse, de la noblesse riche tout au moins qui devenait la haute noblesse en dépensant ses revenus à Paris, et qui, de tous les coins du royaume, vint y élire domicile. Sous ces influences multiples, le prix moyen des immeubles parisiens, qui avait été de 1 130 francs au XVe siècle, et de 4 420 francs au XVIe, sauta au XVIIe à 29 600 francs.

Au siècle suivant, l’augmentation des bâtimens fut beaucoup moindre. Quoique le sol n’ait cessé de hausser, sous Louis XV et Louis XVI, presque dans la même proportion que sous Louis XIII et durant la première moitié du règne de Louis XIV, la valeur des maisons ne ressort, de 1701 à 1800, qu’à 39 800 francs, c’est-à-dire à 34 pour 100 de plus que pendant les cent années précédentes ; tandis que ces cent années elles-mêmes étaient supérieures de 570 pour 100 à la période comprise entre Louis XII et Henri III. Cela tient, comme je l’ai dit ci-dessus, à la baisse des immeubles de 1701 à 1725 : baisse énorme ; puisque, après avoir été de