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ou les plantes n’apparaissent que tardivement. L’avoine semée au printemps de 1893, pendant cette période sans pluie que nous avons signalée ici même[1], a parcouru hâtivement les phases de sa végétation ; la récolte a été réduite ; l’avoine est en ce moment au même prix que le blé.

Quand l’humidité est suffisante, comme nous avons eu soin qu’elle le fût dans notre expérience, la germination a lieu : les réserves de la graine suffisent à la formation des jeunes organes ; mais très vite nous voyons le colza semé dans notre sable calciné jaunir, et si on se borne aux arrosemens à l’eau distillée, il périt ; le blé résiste un peu plus longtemps, car la graine dont il provient est plus grosse, plus chargée d’amidon et de la matière azotée qui servent l’un et l’autre à la formation des organes nouveaux. La graine est une mère et une nourrice ; mais dans le colza la nourrice, très faible, est bien vite épuisée ; elle ne l’est qu’un peu plus tard dans le blé ; mais cependant la graine se vide, l’épiderme seul subsiste, et à son tour la jeune plante périt.

Ainsi l’air et l’eau, suffisans pour déterminer la germination, sont incapables de soutenir la vie végétale ; l’expérience nous a enseigné quelles sont les matières qu’elle exige ; nous savons préparer dans les laboratoires de physiologie des dissolutions que nous désignons sous le nom de « mélanges nutritifs » ; arrosons nos semis, avant qu’ils aient donné les moindres signes d’affaiblissement, avec un de ces mélanges dans lequel nous aurons soin de ne pas introduire de combinaisons du carbone : les semis deviennent vigoureux, les feuilles se développent les unes après les autres. Prolongeons l’expérience pendant deux mois, puis renversons nos vases, lavons avec soin les racines pour les dégager du sable, et pesons nos récoltes : leur poids est bien supérieur à celui des graines primitives ; mais les graines sont presque sèches, les plantes gorgées d’eau : il convient donc de dessécher complètement nos semis et des graines semblables à celles que nous avons semées pour savoir si réellement dans ce sable stérile de la matière végétale a été élaborée. Après dessiccation nous pesons de nouveau : décidément les plantes sèches sont plus lourdes que les graines ; le mélange nutritif employé a été efficace, les plantes se sont accrues.

Pour pénétrer plus avant, procédons à l’analyse élémentaire ; déterminons les corps simples qui constituent les plantes récoltées : en comparant cette composition à celle de la graine, nous allons savoir quels sont ceux que la jeune plante s’est assimilés

  1. Voir la Revue du 15 octobre 1893.