la nature ; il a su mieux décrire qu’eux la vie nouvelle qui circule dans le monde naissant, la terre qui devient féconde et se couvre d’herbes, les forêts « vêtues de leurs chevelures de feuilles et habitées par des nids bavards ; » puis tous les animaux de la terre et de la mer qui s’élancent à la vie, les oiseaux qui ébranlent l’air de leur vol haletant et qui chantent pour remercier le Seigneur qui vient de leur donner l’être :
- Exilit inde volans gens plumea læta per auras,
- Aera concutiens pennis crépitante volatu
- Ac varias fundunt voccs modulamine blando,
- Et, puto, collaudant Dominum meruisse creari.
Pour représenter l’homme qui vient de naître et le distinguer, dès le début, par son attribut particulier, Dracontius a trouvé une invention ingénieuse : non seulement il le montre qui regarde avec admiration le beau spectacle du monde, mais il suppose qu’il pense, qu’il réfléchit ; tandis que les animaux se laissent tranquillement vivre, lui veut savoir ce qu’il est, pourquoi il a été créé, et il cherche autour de lui qui pourra le lui dire. Quand il voit les bêtes se sauver à son approche, il s’inquiète, il a le sentiment de sa solitude : c’est alors que Dieu lui donne une compagne. Les auteurs ecclésiastiques glissent généralement sur la création de la femme : Dracontius, qui est un laïque, se sent plus à son aise ; il décrit Eve avec complaisance quand elle se montre à celui qui va devenir son époux : « Elle parut devant lui sans voiles, avec son corps blanc coin me la neige, semblable à une nymphe qui sort des eaux. Sa chevelure que le fer n’avait pas touchée flottait sur ses épaules ; la rougeur parait sa joue, tout était beau en elle, et l’on voyait bien qu’elle sortait des mains du Tout-Puissant : »
- Constitit ante oculos nullo velamine tecta
- Corpore nuda simul niveo, quasi nympha profundi.
Puis il est heureux de les suivre dans ces bosquets en fleurs et ces parterres de roses où ils vont se cacher :
- lbant per flores et tota rosaria bini,
- Inter odoratas messes lucosque virentes.
On trouverait encore de beaux vers dans les deux autres livres, quoiqu’ils y soient plus rares. L’auteur y insiste toujours sur la miséricorde divine ; il a besoin d’y croire pour espérer qu’elle amènera la fin de ses maux. Dieu est bon, il écoute toutes les prières, il soulage toutes les infortunes. On n’a qu’à s’adresser à lui pour être exaucé : « Judas lui-même, le misérable Judas, s’il