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toute seule de Sougy vers Terminiers et Lumeau, le terme hypothétique de sa sanglante étape étant marqué à Poinville ; au centre, les divisions Barry et Jauréguiberry, l’une derrière l’autre, avec une demi-lieue de distance, quittaient Terminiers et Faverolles, et se dirigeaient par Villours, Loigny, Tillai-le-Peneux... ; la cavalerie du général Michel, les francs-tireurs de Poudras et de Lipowski avaient à louvoyer et à convoyer sur le flanc gauche.

Les forces allemandes, surprises la veille et repoussées, n’avaient plus révélé leur présence que par les grands feux de leurs bivouacs; on ne savait rien de précis sur elles, et le vent d’Est avait emporté dans l’inconnu le bruit des coups de feu échangés vers minuit, du côté de Bourneville, entre des grand’ gardes de cavalerie. Il était six heures du matin : le corps bavarois attendait près de la Maladrerie, en position de rassemblement. La cavalerie du prince Albert s’étendait à sa droite. Les 17e et 22e divisions sortaient des cantonnemens éloignés qu’elles occupaient au nord; celle-là, destinée à heurter le 15e corps français et à soutenir le combat isolé de Poupry, se hâtait vers Baigneaux; celle-ci, vers Lumeau, que convoitait de plus près la division Maurandy. A huit heures, le grand-duc changeait sa disposition et portait par une marche de flanc les Bavarois vers le front : Beauvilliers-château de Goury. Ses têtes de colonnes, en s’ébranlant, pouvaient apercevoir, vers Loigny et sur une direction convergente à la leur, les éclaireurs de la division Barry.

Les deux axes de mouvement se coupaient au château de Goury : ce point se trouvait ainsi désigné comme premier objet du conflit; et d’abord, un bataillon prussien, rappelé en grande hâte de Lumeau, s’y fortifiait. Une longue façade sinistre, percée de fenêtres nombreuses, une clôture si délabrée que trois coups de pioche suffisaient pour y pratiquer une meurtrière, formaient double courtine sur la direction de l’attaque française et donnaient contre elle un double étage de feux. Cependant, le 38e régiment, déployé et tenant la droite de la ligne, se présentait devant l’obstacle; la fusillade s’engageait vers neuf heures et demie. Bien n’était décidé encore quand la 4e brigade bavaroise arrivait à son tour. Déjà, elle avait jeté face à droite, entre Beauvilliers et Goury, une batterie légère et deux batteries lourdes, et vu cette artillerie devancer par son feu l’artillerie française, singulièrement oubliée et retardée; renforçant ensuite la garnison du château, elle le dépassait par un de ses bataillons, qu’elle rabattait enfin contre l’assaillant.

Ce bataillon se démasqua et s’avança obliquement contre le 38e ; mais, aperçu de la sorte vers la droite, il paraissait venir de Lumeau : on le prit pour un détachement de la division Maurandy; et le commandant Gariod, qui se trouvait le plus directement