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Et le fin tintement des cloches des troupeaux
De chèvres se mêlait au murmure des eaux
De l’Eurotas bleuâtre entre ses lauriers-roses...
Et parmi la splendeur rayonnante des choses
Je vis s’ouvrir, comme en un rêve, de beaux yeux.
Des yeux bleus et profonds comme ces vastes cieux.
Un front blanc m’apparut sous des boucles dorées,
Une bouche semblable aux corolles pourprées
De l’anémone rouge, et qui me souriait
D’un sourire magique et dont le clair reflet
Passa comme un frisson sur le clair paysage;
Et pour accompagner l’adorable visage,
Des voiles blancs moulaient un corps puissant et pur
Et c’était, ce fantôme auréolé d’azur.
Toi qui régnas jadis ici, sublime Hélène,
Toi dans la majesté de ton âme sereine...
— « Ame sereine autant que le calme des mers, »
Chantait le chœur antique, et ces héros si fiers
De marcher à la mort pour tes péchés de femme.
N’avaient, en te voyant, d’autre soupir de blâme
Que d’ajouter : « Heureux qui te respire, ô fleur
De l’Eurotas, — ô fleur d’amour, fatale au cœur! »


Sparte.


PAUL BOURGET.