chargée de la direction de l’Ecole préparatoire, — nous apprend quels étaient ses répondans et quelles ses vues d’avenir : « L’intérêt pécuniaire n’est point ce qui m’a guidé dans cette demande[1]. M. Guéneau de Mussy, auquel j’ai exposé mes idées sur l’unité religieuse de la philosophie et de l’histoire, peut attester que mes mobiles sont d’un ordre plus élevé… Tout mon présent, tout mon avenir sont dans l’Université. Je n’ambitionne rien en dehors. C’est ma patrie ; j’y veux vivre et mourir. Dès mon enfance, les premières consolations qui ont adouci les malheurs de ma famille me sont venues de l’Université… Mes seuls amis, mes seuls protecteurs sont dans l’Université. Je n’en ai jamais cherché ailleurs. Ce sont plusieurs membres du Conseil royal, quelques inspecteurs, enfin mes anciens professeurs ; ce sont MM. Guéneau de Mussy, de Maussion et Nicole, Mazure, Létendart, Villemain et Leclerc. Les trois derniers de ces messieurs me connaissent depuis douze ans ; ils peuvent dire dans quelle retraite j’ai vécu, d’abord auprès d’une mère malade, depuis dans le faubourg le plus éloigné[2] ; c’est ce qui m’a permis d’acquérir des connaissances plus variées peut-être que les personnes qui, avec plus de facilité, partagent leur vie entre le monde et l’étude[3]. »
Une grave maladie, qui mit en danger la vie de Michelet en novembre 1826, fit suspendre sa nomination, et l’enseignement qu’il demandait fut provisoirement confié à Armand Marrast, ce fantaisiste surveillant général de l’Ecole préparatoire, qui charmait les loisirs des élèves en leur chantant les chansons de Béranger avec accompagnement de guitare. Enfin, le 3 février 1829, Mgr Frayssinous nomma Michelet maître de conférences de philosophie et d’histoire[4]. Il avait adressé au ministre un plan détaillé de son cours, qui malheureusement ne nous a pas été conservé. Ce ne devait être que le développement de la formule présentée à Guéneau de Mussy : l’unité religieuse de l’histoire et de la philosophie. Il considéra en effet ses deux
- ↑ On le croira sans peine. Il eut 2 000 francs de traitement pour son double enseignement. Il fut, sur ses réclamations, porté à 2400 francs le 29 novembre 1828, puis à 3 000 francs le 2 novembre 1829.
- ↑ Il avait habité rue de la Roquette jusqu’en 1827 ; il vint alors rue de l’Arbalète. Il était marié depuis 1824 et garda son père auprès de lui.
- ↑ Ces lettres sont conservées aux Archives nationales.
- ↑ On voit dans la préface de l’Histoire de France de 1869 que Michelet s’imagina plus tard avoir été nommé sous Martignac, par Vatimesnil : « Sous le ministère Martignac, dit-il (un court moment de libéralité), on s’avisa de refaire l’École normale, et M. Letronne, que l’on consulta, me fit donner l’enseignement de la philosophie et de l’histoire ». Tous les biographes de Michelet ont naturellement reproduit cette erreur. Il ne dut à Vatimesnil que sa première augmentation de traitement.