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III

En général, la démocratie helvétique, comme la démocratie grisonne que l’on a prise pour type, est une démocratie poussée presque jusqu’à l’extrême et, comme elle, c’est une démocratie historique. Que l’on observe la Confédération dans son ensemble, dans ses organes fédéraux, ou chacun des cantons séparément dans ses institutions particulières : dans les institutions communes à tous ses membres, dans ses organes nationaux ou locaux, partout on pourra constater que, d’une part, sauf les différences de degré, ces institutions et ces organes touchent à l’extrême démocratie et que, d’autre part, ils sont restés relativement pareils à ce qu’ils étaient, lorsqu’il a commencé à y avoir une Suisse et que la Suisse a commencé à avoir une histoire.

On sait en quoi consiste le gouvernement même de la Confédération[1]. Le pouvoir exécutif est confié à un Conseil fédéral de sept membres, qui président aux diverses parties de l’administration publique. Le Conseil fédéral équivaut à notre Conseil des ministres. Les membres du Conseil fédéral élisent, entre eux et pour un an, leur président qui est ipso facto le président de la Confédération[2]. Eux-mêmes sont élus pour trois ans par les deux Chambres de l’Assemblée fédérale, Conseil des États, Conseil national[3].

A chaque député appartient le droit d’initiative en matière de législation fédérale. Ce droit appartient aussi à chaque canton, et nous retrouvons alors l’extrême démocratie, la souveraineté populaire directe s’exprimant, passivement, par le référendum, activement, par l’initiative du peuple lui-même[4] ; la

  1. Voy. là-dessus l’ouvrage, devenu très rare, du Dr.T. Dubs, le Droit public fédéral, et surtout le traité classique de MM. Blumer et Morel : Handbuch des Schweizerischen Bundesstaatsrechtes ; Bâle, Bruno Schwabe, in-8o, 2 tomes en 3 volumes, 1880-1891.
  2. Il n’est rééligible qu’un an après être sorti de charge.
  3. Le Conseil des États se compose de 44 membres, deux par canton ; le Conseil national, de 145 députés, nommés au suffrage direct, à raison de un pour 20 000 habitans. En ce qui concerne le Conseil des États, la durée du mandat et le modo de l’élection sont librement réglés par les lois de chaque canton. Au Conseil national sont éligibles tous les électeurs laïques. Est électeur fédéral tout citoyen suisse âgé de 20 ans, hors les exceptions d’indignité prévues et définies par les lois de son canton. Les députés sont élus pour trois ans.
  4. Le référendum est obligatoire dans un certain nombre de cas : s’il s’agit d’une révision de la Constitution fédérale, que la proposition en émane soit de l’Assemblée fédérale, soit de l’une des deux Chambres ou qu’elle soit la suite d’une pétition signée d’au moins 50 000 électeurs. Il est obligatoire encore sur l’approbation ou le rejet définitifs d’une loi, quelle qu’elle soit, « d’un caractère impératif général et de nature non urgente », votée par l’Assemblée fédérale — quand 30 000 citoyens ou 8 cantons au moins le réclament, dans un délai de 90 jours après la publication. De même désormais pour l’initiative, si 30 000 citoyens demandent que telle loi soit mise aux voix sur tel objet.