mérité. J’ai vu d’autre part la Reine. Elle avait bien voulu depuis longtemps se montrer favorable à ce mariage, et c’est à la finesse de ma diplomatie qu’elle a la bonté d’en attribuer l’heureuse conclusion. Je n’ai point détrompé Sa Majesté pour ne la point démentir, mais mes talens n’y sont pour rien. Ils sont même restés jusqu’ici impuissans à démêler les vraies raisons d’un revirement si extraordinaire. Car, tel que vous me voyez, je ne sais rien, si ce n’est que mon gendre m’a chargé à son retour d’avertir William qu’il lui permettait de lui écrire et que de son côté il lui a répondu les lettres les meilleures.
« Si ses véritables motifs m’échappent, il n’en est pas moins vrai que sa conduite passée à notre égard lui inspire, depuis ce retour, un regret et des repentirs que, sans manquer à sa dignité, il nous fait sentir en toute occasion. Il tolère maintenant mes rêveries et, pour mes collections, m’a rapporté de son expédition les objets les plus rares. Sa tendresse pour sa fille augmente de jour en jour, et en pleurant de joie, lady Hyland me répète qu’elle ne trouve pas qu’elle-même ait payé trop cher ses larmes heureuses. »
Le fidèle John était cependant venu m’avertir que, ravi de me voir, son maître allait bientôt paraître. Mais avant que celui-ci se montrât, j’eus le temps d’interroger le Très Honorable sur plusieurs détails particuliers qui n’étaient pas pour moi sans intérêt.
C’est ainsi que j’appris le banquet donné aux deux cent cinquante Anglais du Samson qui s’étaient tous empressés avenir féliciter le noble lord du succès de son expédition. Le commandant Hector tenait la place d’honneur; c’était d’abord à lui que lord Hyland avait bu, il lui avait ensuite présenté des cigares de sa propre main, ce dont l’excellent homme dut être plus étonné que des gratifications qui lui furent remises pour l’équipage et doublées pour les nègres et les Hindous. Lord Hyland avait ensuite attaché M. Renard à sa maison, autant pour encourager ses talens, qu’afin de ne le point séparer de John et des deux jolies caméristes sur lesquelles, je suppose, ils avaient fini par s’entendre.
Il avait enfin satisfait tout le monde, et même M. Goldmann, — c’était le nom du banquier, — en acceptant de dîner chez lui. Seul, en effet, parmi les invités du Samson, M. Goldmann s’était cru obligé, par délicatesse, à rendre au noble lord sa politesse. Il est vrai que cette délicatesse n’était pas allée jusqu’à empêcher qu’en insistant sur les splendeurs de cette réception et les beaux