ordres et critique rarement ; il se montre de bonne heure ce qu’il sera jusqu’à la fin, l’homme de l’obéissance religieuse, de l’abnégation constante. Proposé pour la croix après la première campagne contre Abd-el-Kader, le lieutenant pria le colonel Combe de reporter la proposition sur son capitaine, qui avait plus fait. Cette modestie ne fut pas du goût de Marbot, venu à la suite du duc d’Orléans en Algérie où il veillait de loin sur son petit cousin. — « Tu es une f… bête, je ne veux pas de Romains dans ma famille ! » L’occasion d’acheter chèrement le ruban ne devait pas se faire attendre ; le 47e prit part à l’assaut de Constantine. Ce fut, comme on sait, une des actions de guerre les plus honorables et les plus sanglantes de la conquête algérienne. Que de fois j’en ai entendu conter les péripéties par le vieux général Le Flô ! Quand la colonne de La Moricière eut disparu dans la fournaise, après l’explosion sous la voûte du portail, le colonel Combe s’élança à la tête de la deuxième colonne. Canrobert marchait à ses côtés ; il tomba, la jambe traversée d’une balle, un peu avant que son chef ne fût blessé mortellement. Les deux officiers se retrouvèrent côte à côte à l’ambulance de Koudial-Aty. Comme le général Valée et le duc de Nemours venaient visiter le grenadier de Waterloo, Combe se souleva un instant et ramassa ses forces pour leur dire : « Je ne vous demande rien pour moi, je meurs ; mais, au nom de la France et de l’armée, laissez-moi appeler toute votre attention sur quatre officiers de mon régiment : » Et il nomma Canrobert le premier, en ajoutant : « Il a toutes les qualités voulues pour devenir un jour un chef remarquable. »
Le capitaine Canrobert quitta pour peu de temps l’Afrique. Appelé en 1839 au camp de Saint-Omer, où le duc d’Orléans organisait les bataillons de chasseurs à pied, il retournait bientôt à Alger comme adjudant-major, puis comme chef d’un de ces bataillons, le 5e. Les années passent, remplies par de fatigantes opérations, marches et contremarches aux trousses de Bou-Maza ; le consciencieux officier s’en acquitte toujours avec le même zèle. La fortune lui réservait, pour clore sa carrière africaine, le brillant succès qui allait établir définitivement sa réputation dans l’armée : la prise de Zaatcha. Cette bicoque, centre d’un groupe de ksour des Ziban, au sud de Biskra, s’était mise en insurrection au printemps de 1849, à l’instigation d’un Arabe intelligent et résolu, Bou-Ziane. Un premier échec du colonel Carbuccia grandit l’autorité de Bou-Ziane : la révolte gagna le pays environnant. Le général Herbillon ramassa toutes les troupes disponibles et vint mettre le siège devant Zaatcha : la petite place, admirablement défendue, repoussa l’assaillant à