fondées, deux rois, un grand-duc, le pape arrachés à la coalition, les Anglais chassés des ports, l’Adriatique ouverte à la France, la Macédoine sous ses prises, voilà ce qu’a fait l’armée d’Italie. « Mais vous n’avez pas encore tout achevé… Il n’est plus d’espérance pour la paix qu’en allant la chercher dans le cœur des États héréditaires de la maison d’Autriche… L’or de l’Angleterre a corrompu les ministres de l’empereur… La maison d’Autriche se trouvera réduite au rang des puissances secondaires où elle s’est déjà placée en se mettant aux gages de l’Angleterre. » Puis, se prémunissant contre un revers, voulant surtout disposer les esprits à recevoir comme une œuvre de salut public le traité qu’il jugera de son intérêt de signer, il écrit au Directoire : « Il est impossible qu’avec 50 000 hommes je puisse suffire à tout… Si on me laisse accabler, je n’aurai d’autre ressource que de me retirer en Italie, et tout sera perdu. »
Tout fut sauvé encore une fois. Admirablement secondé par Massé nu, Bonaparte battit les deux années autrichiennes, et força l’archiduc à se replier sur la route de Vienne. Il s’avance au cœur des États autrichiens ; mais s’il ne frappe pas de terreur la cour de Vienne, il est en péril. Que l’empereur soulève ses peuples, qu’il rappelle une partie de ses troupes d’Allemagne, qu’il se mette lui-même à la tête de son armée, Bonaparte, affaibli par les garnisons qu’il a laissées sur son passage, sans ligne de retraite assurée, peut être anéanti. Il ne peut s’en tirer que par une « sommation militaire » qui épouvantera les Viennois, et lui permettra, comme le dit Marmont, « de réaliser ses avantages, de sortir d’une position équivoque et soumise à de grandes chances contraires. » Le 21 mars, de Klagenfurt, il adresse à l’archiduc une belle lettre ostensible et très pathétique ; elle se termine par cette phrase que Frédéric eût signée et que Voltaire eût applaudie : « Je m’estimerais plus fier de la couronne civique que je me trouverais avoir méritée que de la triste gloire qui peut revenir des succès militaires. »
Cependant Venise se livre. Aux séditions fomentées par les émissaires milanais et français, répondent les insurrections des paysans et de la populace des villes. Les troupes françaises soutiennent les « patriotes démocrates » qui veulent renverser l’oligarchie ; les paysans et le petit peuple réclament l’ancien gouvernement. Voyant les « patriotes » mêlés aux Français et aux Milanais, ils massacrent tout et pillent à l’aveugle aux cris de : Mort aux Jacobins ! Le Sénat de Venise laisse ses boute-feux allumer l’incendie et ne fait rien pour l’éteindre ; il attend les événemens et se prémunit, à toute aventure : il députe vers les