locomotive en action a sa grandeur, un marteau-pilon en marche a su majesté, — il est vilain au repos. L’architecte essaie-t-il d’en faire des monumens pour récréer la vue, son aspect osseux demeure pauvre, triste et sec. Cependant toute notre existence matérielle repose aujourd’hui sur lui.
En même temps qu’il en multipliait l’emploi, le siècle présent a perfectionné la fabrication de ce métal. La fonction et l’organe ont grandi de concert. Il n’existait pas autrefois de population manufacturière pour le fer ; jusqu’à la Révolution la fonderie demeura œuvre purement agricole, tandis que beaucoup d’autres branches du travail national, — les textiles par exemple, — avaient déjà pris la forme industrielle.
On possédait une forge au XVIIIe siècle comme on a de nos jours une ferme. Le haut fourneau s’allumait à la fin des vendanges, pour s’éteindre à la récolte des foins. C’était, en pays de minerai, une occupation d’hiver. Le cultivateur se faisait mineur sans beaucoup d’efforts ; il grattait, creusait quelque coin propice de son champ. Sa hotte une fois pleine, il allait à la forge voisine en vendre le contenu qu’il versait dans l’orifice du four ; puis il repartait la remplir de nouveau. La production de ces fourneaux anciens, hauts d’environ quatre mètres, était en rapport avec cette alimentation rudimentaire. Ils fournissaient de 1 000 à 1 500 kilos de fonte par jour, tandis que ceux d’aujourd’hui, ayant 24 mètres d’élévation et larges à proportion, rendent quotidiennement 125 000 kilos de fonte ; — et certaines usines en entretiennent huit ou neuf.
En comparant les livres de métallurgie, depuis la fin du XVe siècle jusqu’au commencement du XVIIIe, on constate que les procédés, d’une date à l’autre, n’ont pas varié. Les forges les plus antiques n’avaient que des soufflets manœuvres à la main, ou bien, établies sur les hauteurs, elles utilisaient la force du vent pour faire marcher leur soufflerie, par un mécanisme sans doute analogue à celui des moulins. Dès le règne de Louis XII, elles s’installèrent près des cours d’eau, dont elles avaient appris à se servir comme moteurs. Au lieu d’être cantonnées, ainsi que de nos jours, en sept départemens, — dont deux, la Meurthe-et-Moselle et le Nord, produisent à eux seuls les trois quarts du stock annuel des fontes françaises, — les forges de naguère étaient éparpillées sur tout le territoire, recherchant toutefois le voisinage des forêts qui leur procuraient le combustible.