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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 128.djvu/596

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dépense plus pour ses travaux publics que telle autre nation qui n’aurait pas de chemins de fer d’Etat. Il faut au contraire voir dans les recettes annuelles nettes qu’elle retire de cette exploitation une véritable rente patrimoniale qui vient atténuer d’autant les charges des contribuables, sans oublier d’ailleurs que ceux-ci ont payé de leurs deniers la construction ou l’acquisition des lignes.

Le domaine particulier de l’Empire allemand proprement dit est peu étendu. Les seules lignes de chemins de fer qu’il possède sont celles d’Alsace-Lorraine, 1200 kilomètres environ. De nombreux partisans de la centralisation ont réclamé la reprise générale des chemins de fer par l’Empire ; mais la Prusse, le plus particulariste, au dire de Bismarck lui-même, des États allemands, a tenu bon et n’a pas voulu céder son réseau de 27 000 kilomètres, qu’elle considère comme un des élémens de sa puissance militaire et qui fournit à son budget une ressource importante.

La constitution prussienne du 31 janvier 1850 avait établi d’une manière définitive que le budget serait voté par la Diète (Landtag), formée par la réunion de la Chambre des députés (Abgeordnetenhaus) et de la Chambre des seigneurs (Herrenhaus). De 1862 à 1866 un conflit aigu s’éleva entre le gouvernement et la Diète, qui refusa de voter le plan de réorganisation militaire proposé par Bismarck : quatre budgets successifs demeurèrent privés de la sanction législative la plus importante, celle de la Chambre qui émane directement du suffrage populaire. Le roi et son ministère passèrent outre et tirent exécuter les lois de finances votées par la seule Chambre haute. Les victoires de 1866 arrivèrent fort à propos pour amener une réconciliation : un bill d’indemnité ratifia après coup les dépenses faites sans base légale ; le roi Guillaume lui-même reconnut que la loi avait été violée. La constitution allemande du 16 avril 1871 prescrit que toute loi impériale doit être approuvée par la majorité du Conseil fédéral et celle du Parlement : le budget est soumis à cette règle.

L’année financière allemande, comme celle de la Prusse, s’ouvre le 1er avril pour se clore le 31 mars. L’avantage allégué par les partisans de ce système est que le vote du budget intervient à une époque plus rapprochée de celle où l’on peut déjà mieux se rendre compte des résultats probables de l’exercice que lorsque le calendrier budgétaire coïncide avec l’année commune. Nous ne voyons pas pour notre part l’amélioration qui en résulterait chez nous ; les habitudes déplorables prises par la Chambre traînent en longueur la discussion du budget et nous acculent au pileux expédient des douzièmes provisoires : faire commencer notre exercice au 1er avril au lieu du 1er janvier ne changerait pas la tradition.

Le budget allemand, comme le budget prussien, est établi