la dictature parlementaire, comme autrefois M. Tricoupi. C’est ce qu’il espère ; mais il se fait peut-être des illusions. Un troisième parti s’est créé, celui de M. Rally, qui n’aura pas la majorité, mais qui peut détenir à son profit un certain nombre de voix. En outre il y a un groupe d’indépendans, dont le chiffre, dans la dernière législature, a varié de 16 à 30 et pourrait s’élever plus haut dans la prochaine Chambre. Ils étaient et resteront hostiles à M. Tricoupi ; mais ils ne sont pas inféodés à M. Théodore Delyanni et ils tâcheront de lui faire leurs conditions. Il est donc permis de mettre en doute la formation, dans la nouvelle Chambre, d’une majorité compacte disciplinée, obéissant à un seul chef.
Quand on a connu en Occident, par des dépêches nécessairement incomplètes, les incidens qui ont accompagné la chute du ministère Tricoupi, on a considéré les mesures prises par le roi Georges comme constituant une sorte de coup d’Etat et l’on a cru que l’on allait voir grandir l’agitation. Au contraire, elle s’est calmée. À la veille de la démission de M. Tricoupi, on commençait, dans le Péloponnèse, à parler de refuser le paiement des impôts. On était cependant en face d’un ministère responsable, soutenu par une majorité faible et vacillante, sans doute, mais enfin par une majorité. Aujourd’hui, la situation est toute différente. Le ministère est l’œuvre personnelle du roi ; il ne s’appuie que sur la Couronne. Aucune résistance dans le pays. Le calme est complet. Les impôts rentrent régulièrement, bien que la Chambre ait été dissoute sans avoir voté le budget de cette année. La prochaine Chambre, quelles que soient ses tendances, quelle que soit la majorité qui s’y manifestera, votera sans difficulté un bill d’indemnité au cabinet Nicolas Delyanni pour avoir perçu les impôts et assuré la marche des services publics.
Au milieu du discrédit des hommes et des institutions, la royauté seule a gagné du terrain. Le peuple ; hellène présente ce singulier contraste d’être à la fois très démocrate et très royaliste. L’égalité, en Grèce, est absolue. Elle est dans les lois, elle est dans les mœurs. Point d’aristocratie de naissance, comme sous l’ancienne monarchie française, point d’aristocratie militaire, comme sous le premier Empire. Une seule institution s’élève au-dessus des autres : la monarchie. Les Grecs tiennent à la garder, moins par sentiment que par intérêt. Ils sont trop intelligens pour ne pas comprendre que dans une société démocratique, divisée en partis qui se font une guerre acharnée, la république conduirait à la décomposition absolue. Quand ils ont renversé le roi Othon, ils ont demandé un autre monarque. Le roi Georges, qui règne depuis trente et un ans, a conquis peu à peu, en dehors du prestige attaché à sa situation, une grande autorité personnelle. Il l’a