telle autre. Ce qui veut dire, pour parler clairement : — Allez de votre côté et laissez-moi aller du mien. — Il est difficile de prévoir exactement ce que vaudront ces arrangemens dans l’avenir. Pour en retrouver d’équivalens, il faut remonter très haut dans l’histoire, il faut retourner au XVIe siècle, après les belles explorations des Portugais et des Espagnols. Alors, comme aujourd’hui, des conflits étaient à craindre, et, pour les prévenir, on s’était adressé au pape, qui était la grande autorité morale de cette époque. Tout le monde sait comment Alexandre VI a divisé les deux nouveaux mondes, l’américain et l’asiatique, en deux parties : tout ce qui était à l’orient des îles Açores devait appartenir au Portugal, tout ce qui était à l’occident a été attribué à l’Espagne. On a tracé, comme à présent, des lignes sur les cartes ; mais elles n’ont pas arrêté les explorations et les découvertes nouvelles, et la fameuse « ligne de marcation » d’Alexandre VI a dû bientôt faire place à d’autres combinaisons. Voilà l’origine et comme l’ancêtre de toutes les lignes du même genre que nous voyons jeter aujourd’hui sur le papier, et qui ne seront probablement pas plus définitives. Les mêmes situations amènent les mêmes expédiens, avec la différence que nous procédons en petit relativement à ce qu’on faisait autrefois. Quoi qu’il en soit, l’Angleterre, et c’est son droit, essaie de fixer sa sphère d’influence sur le Haut-Nil. Nous ne lui reprochons que deux choses. La première est de confondre systématiquement sa sphère d’influence avec les possessions directes de l’Egypte. Les termes mêmes employés pour définir les deux situations sont empruntés à des vocabulaires différens : ils ne peuvent pas être transposés indifféremment de l’un à l’autre. Ce qui entre dans la sphère d’influence d’une grande puissance, c’est ce qui n’appartient jusqu’ici à aucune autre, ce qui, par exemple, n’appartient pas à la Porte ; ce sont ces régions encore démesurées où la barbarie seule est souveraine, et où l’influence d’une nation européenne, lorsqu’elle parvient à s’y faire sentir, ne peut apporter que la civilisation et le progrès. Mais le gouvernement anglais joue avec les mots de sphère d’influence britannique et de possessions égyptiennes comme il l’a fait avec ceux de vallée et de bassin du Nil, et cela appelle des distinctions nécessaires.
Ces distinctions ont été faites, en langage très diplomatique, par M. Hanotaux. Il a été appelé à la tribune du Sénat par M. de Lamarzelle, et tout porte à croire qu’il n’était pas fâché d’avoir l’occasion de s’expliquer. Comment aurait-il pu traiter par prétention et passer sous silence le discours de sir Edward Grey ? Toute la presse anglaise a rendu justice à la parfaite courtoisie de notre ministre des affaires étrangères, mais elle ne paraît pas avoir été aussi satisfaite de la substance même de son discours. Ce discours est embarrassant. On a beau le tourner et le retourner, on ne trouve aucun point sur lequel il prête à la contestation, et il conteste lui-même, en termes très mesurés mais