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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 129.djvu/254

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mais sa présence en Italie est nécessaire « pour consolider le nouvel ordre de choses qui va s’établir… » La République lombarde ne peut se constituer sans lui, « puisque l’établissement de cet État libre est un des principaux fruits de ses victoires. » Enfin, devançant ses désirs et ouvrant la voie à la plus machiavélique de ses combinaisons, ils ajoutent : « Un autre motif qui doit prolonger quelque temps encore votre séjour dans ces contrées, c’est l’éclat que le gouvernement vénitien a donné à sa haine contre la France. Prenez envers lui toutes les mesures qu’autorise l’insurrection qui vient de se manifester ; allez, s’il le faut, jusqu’à Venise, et rendez-nous compte de vos dispositions, afin d’instruire le Corps législatif de la nécessité où vous aurez été d’en agir hostilement à l’égard de cette puissance perfide. »

Ainsi, pour le passé, approbation complète ; pour l’avenir, carte blanche. Le 6 mai, des pleins pouvoirs sont envoyés à Bonaparte et à Clarke ; Clarke n’est plus qu’adjoint à la négociation. L’objet de cette négociation, disent les Directeurs, est d’amener l’empereur, par des avantages qu’on lui fera, à stipuler la cession de la rive gauche, comme préliminaire à la paix de l’empire. Nous n’évacuerons l’Italie que quand l’Autriche aura évacué Mayence. Toutefois, frappé un moment par les argumens de Bonaparte, le Directoire renonce à bouleverser l’Allemagne. Il ne faut, dit-il, accorder de territoires allemands à l’empereur que s’il renonce à des territoires équivalens en Italie ; il a assez reçu ; il serait dangereux de le fortifier davantage, et d’autant plus que « le roi de Prusse en voudrait tout autant. » Venise, réduite aux lagunes, devait, d’après les préliminaires, être indemnisée avec les Légations. Le Directoire annule cette clause : Venise doit être non seulement châtiée, mais conquise : « Les hostilités qu’elle a commencées autorisent le général en chef à prendre toutes les mesures de rigueur que les circonstances exigent. » Le Sénat sera invité à réunir cette république aux Légations, formées en république cispadane ; s’il refuse, « le général en chef doit aller en avant pour l’occupation de la terre ferme et l’exécution des préliminaires. » « Le Directoire exécutif donne à cet effet les pouvoirs les plus étendus » aux généraux Bonaparte et Clarke… Ces généraux, étant sur les lieux et traitant directement avec les mandataires de l’empereur, « peuvent mieux que personne juger quelles sont les conditions les plus avantageuses à la République qu’il est possible d’obtenir, et quels sont les moyens d’y arriver promptement… Les présentes instructions ne sont pas tellement impératives qu’ils ne puissent s’en écarter, si le bien de la République l’exige. » Le Directoire voulait présenter aux conseils les mesures