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pour une même particule, se reproduisent un grand nombre de fois par seconde ; la particule gazeuse n’a donc pas le temps de céder au fluide qui l’entoure la chaleur dégagée par compression ni de lui emprunter la chaleur absorbée par la dilatation ; il en résulte que sa température varie sans cesse, s’élevant pendant que la densité augmente, s’abaissant pendant que la densité diminue ; ce n’est plus la loi qui lie entre elles la pression et la densité d’un gaz de température invariable, la loi de Boyle et de Mariotte, qu’il faut appliquer à cette particule ; la relation qui fait ici dépendre la densité de la pression, c’est la relation qui exprime l’absence de tout échange de chaleur entre la particule et la matière qui l’environne. Or cette relation, Laplace l’a indiquée ; lorsqu’on suppose la constance des deux chaleurs spécifiques du gaz, elle prend la forme que Lagrange avait prévue ; elle établit un rapport constant entre la pression et une certaine puissance de la densité ; l’exposant de cette puissance n’est autre que le rapport de la chaleur spécifique du gaz sous pression constante à la chaleur spécifique du gaz sous volume constant. Les diverses expériences que nous avons rapportées conduisent Laplace à attribuer à ce rapport la valeur 1,375 ; elle surpasse seulement d’une petite quantité la valeur qu’avait proposée Lagrange.

Dès 1803, Laplace écrivait, en parlant de la chaleur produite par la compression des gaz : « L’effet de la chaleur ainsi dégagée est sensible sur la vitesse du son ; elle produit l’excès de cette vitesse sur celle que donne la théorie ordinaire, comme je m’en suis assuré par le calcul. » En 1807, dans un beau mémoire sur la Théorie du son, Poisson développait la remarque de Laplace. Enfin, en 1816, celui-ci publiait la règle qui doit être substituée à celle de Newton pour le calcul de la vitesse du son ; cette règle, il l’énonçait ainsi :

« La vitesse du son est égale au produit de la vitesse que donne la formule newtonienne, par la racine carrée du rapport de la chaleur spécifique de l’air sous pression constante à sa chaleur spécifique sous volume constant. »

Il était essentiel de comparer cette règle nouvelle aux résultats de l’expérience et, pour cela, de reprendre d’une manière très précise la détermination de ceux-ci, en ayant égard à Ja pression de l’atmosphère dans laquelle se propageait le son, à la température, à l’état hygrométrique ; « car si les observations précises font naître les théories, la perfection des théories provoque, à son tour, la précision des observations ». À la demande de Laplace, le Bureau des Longitudes détermina à nouveau la valeur de la vitesse du son, tandis que Gay-Lussac et Welter d’un côté, Desormes et Clément de l’autre, reprenaient avec plus de soin la