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desquels ont été créés les hôpitaux marins dont nous avons parlé plus haut. Les guérisons qu’on y obtient sont véritablement remarquables, et nous insisterions avec grand plaisir sur ce sujet, si nous ne l’avions pas déjà traité.

Ce qui précède s’applique surtout aux plages de la mer du Nord, de la Manche et de l’Océan, qui sont les plus fréquentées à l’époque de l’émigration estivale. Il n’y a pas en effet de comparaison à établir entre l’air humide et tourmenté qu’on respire sur les plages de Scheveningen, d’Ostende, de Dieppe ou du Tréport et l’atmosphère lumineuse et limpide de la Méditerranée ; mais ces stations ne répondent pas aux mêmes indications : on les fréquente dans des saisons opposées, et nous nous occuperons de celles du Midi, quand il sera question de la villégiature hivernale.

Les personnes qui fréquentent les plages de la Manche et de l’Océan y sont surtout attirées par l’attrait des bains de mer, et c’est un second élément de la villégiature maritime dont il nous reste à apprécier l’influence. L’hydrothérapie maritime est un des agens les plus efficaces de l’hygiène. Elle joint, à l’action tonique du froid, celle des substances minérales que l’eau de mer tient en dissolution et qui en font une eau saline de premier ordre. Elle se range dans le groupe des chlorobromurées sodiques. Il faut tenir compte aussi de sa densité plus grande que celle de l’eau douce, et des mouvemens dont elle est agitée. Pour toutes ces raisons, les bains de mer sont plus fortifians que ceux de rivière, mais ils sont aussi plus excitans. Ils ne conviennent pas aux sujets très faibles et très impressionnables. La réaction salutaire qui doit suivre le bain ne s’opère que difficilement chez eux. L’immersion brusque du corps tout entier dans cette eau froide, dont la densité est 700 fois plus grande que celle de l’air, cause à ces personnes un resserrement de la poitrine, une sorte de suffocation, une véritable angoisse. Elles grelottent et deviennent violettes. Le choc des vagues leur fait l’effet d’une douche permanente qui les étonne et les fatigue. Elles ont souvent une peine extrême à réagir, et frissonnent parfois pendant plusieurs heures après la sortie du bain.

Les névropathes doivent a fortiori s’en abstenir, sauf dans quelques conditions bien déterminées, et doivent auparavant prendre l’avis de leurs médecins. Les bains de mer sont dangereux pour les gens atteints d’affections du cœur ou des centres nerveux, pour les arthritiques et pour les personnes sujettes aux hémorrhagies, à l’hémoptysie surtout. J’ai vu survenir des crachemens de sang, à la suite d’un bain de mer, chez de jeunes sujets qui n’en avaient pas eu depuis plusieurs années.