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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 juin

Depuis quinze jours, les événemens se sont précipités au dehors avec une telle rapidité qu’il est presque impossible d’en rendre compte d’une manière complète. À l’intérieur, au contraire, la situation est restée stagnante : la Chambre continue de discuter la réforme des boissons. On se demande comment il lui sera possible de voter les quatre contributions directes avant le 14 juillet, date qu’elle assigne, ou du moins qu’elle voudrait être sûre de pouvoir assigner à la fin de ses travaux, à cause des élections aux conseils généraux qui auront lieu le 28. D’autres questions encore, dont la discussion immédiate s’impose pour des motifs divers, viennent à la traverse : tantôt une discussion de crédits supplémentaires où toute la question coloniale se trouve engagée, tantôt une interpellation de M. Jaurès. En réalité, la machine parlementaire s’en va à la dérive, très insuffisamment gouvernée, et il en résulte une situation qui commence à inquiéter sérieusement les esprits observateurs. Nous en reparlerons pendant les vacances ; le temps nous manque aujourd’hui ; c’est plutôt de l’autre côté des frontières que doivent se porter nos regards.

L’Europe a vécu pendant huit jours attentive aux moindres détails des fêtes de Kiel. Elles ont été fort brillantes : l’empereur Guillaume a dû être content de l’impression générale qu’elles ont produite. On a raconté qu’il avait éprouvé un peu de contrariété de quelques incidens sans grande importance, mais nous n’en croyons rien. Les fêtes de ce genre doivent être jugées dans leur ensemble, et l’ensemble cette fois, a été satisfaisant. Quant à l’empereur lui-même, il a tenu, d’abord à Hambourg et ensuite à Kiel, le langage le plus propre à rassurer ses auditeurs. Au milieu d’un formidable appareil de guerre, il n’a parlé que de la paix, de sa ferme volonté de la maintenir, de sa confiance dans sa durée. Le canal qui unit la mer du Nord à la Baltique, et qui, lui aussi, peut à bien des égards être considéré comme un redoutable instrument de guerre, a été présenté au monde comme particulièrement propre à améliorer le sort matériel des nations. Il rendra leurs communications plus faciles et plus promptes. « La mer, a dit le jeune souverain, en rééditant un mot qu’on a pu croire neuf tant il s’appliquait bien à la circonstance, rapproche les nations