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LES FINANCES RUSSES
LE BUDGET ET LE ROUBLE

Il y a trois ans, nous écrivions : « La France est le plus gros créancier de la Russie » ; nous pouvons le répéter aujourd’hui avec d’autant plus de raison que cette créance a augmenté de quarante pour cent depuis lors, et que ce n’est plus cinq, mais six ou sept milliards de valeurs russes qui garnissent les portefeuilles de nos capitalistes. Aux fonds d’État et aux titres de chemins de fer garantis ou achetés par le Trésor s’ajoutent un certain nombre d’actions et d’obligations d’entreprises industrielles : charbonnages, usines, hauts fourneaux, qui s’exploitent avec notre argent et qui grossissent le total de la commandite que nous avons fournie à nos amis du Nord. L’intérêt qui s’attache à l’étude des finances d’un grand Empire se double donc pour nous d’une préoccupation personnelle bien légitime, celle de connaître la situation d’un débiteur qui, tout puissant qu’il est, n’en reste pas moins soumis aux lois humaines de l’économie politique. L’heure est venue de jeter à nouveau les yeux sur les finances et le budget du pays ; de voir quels progrès furent accomplis durant la période pacifique au maintien de laquelle personne n’a plus contribué que le défunt empereur Alexandre III ; d’étudier l’usage fait par la Russie des ressources considérables que lui a fournies la série d’emprunts et de conversions réalisés sur le marché de Paris ; de nous rendre enfin compte de sa situation monétaire et fiduciaire. Ce dernier point est de la plus haute gravité : car, si depuis le début du siècle la Russie n’a pas cessé de remplir scrupuleusement ses obligations vis-à-vis de ses créanciers