et, sous toutes ces constitutions, elle a fait une douzaine de fois le voyage ; le pendule législatif a oscillé une douzaine de fois entre le scrutin d’arrondissement et le scrutin de liste, proclamés tour à tour exécrables et supérieurs. En 1793, l’uninominal ; en 1795, la liste ; en 1814, l’uninominal ; en 1817, la liste ; en 1820, l’uninominal : en 1848, la liste par département ; en 1852, l’uninominal ; en 1871, la liste ; en 1875, l’uninominal ; en 1885, la liste ; en 1889, l’uninominal. Et de même hors de France. Certains pays, comme l’Italie, qui avaient le scrutin de liste, l’ont remplacé par le scrutin d’arrondissement ; mais ils avaient eu auparavant le scrutin d’arrondissement, qu’ils avaient remplacé par le scrutin de liste, — et il n’est pas bien sûr qu’ils s’en tiennent là. Certains pays, comme l’Angleterre, les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne, ont essayé d’une combinaison des deux procédés, et ne s’en sont pas trouvés plus mal, — ni mieux. Ainsi, ni l’infériorité ni la supériorité d’un mode de scrutin sur l’autre n’a été catégoriquement, irréfutablement démontrée, ni par des raisonnemens, ni par les résultats.
Les partisans du scrutin d’arrondissement font valoir que, avec le scrutin de liste, « il est impossible que les électeurs connaissent tous les candidats. » Cela est vrai ; mais est-il vrai que, avec le scrutin d’arrondissement, tous les électeurs connaissent le candidat ? — Avec le scrutin de liste, disent-ils, le comité est tout-puissant, au chef-lieu du département : et, avec le scrutin uninominal, le comité n’est-il pas tout-puissant au chef-lieu de l’arrondissement ? — « Le scrutin de liste favorise le mouvement plébiscitaire » ; mais le scrutin uninominal l’entrave-t-il ? et ne pourrait-on pas répondre que, plus les circonscriptions sont petites, plus elles sont dans la main et à la merci du pouvoir central ? — « Le scrutin de liste favorise des coalitions qui révoltent la conscience publique, et c’est la nuance extrême qui impose ses volontés. » Et en quoi le scrutin d’arrondissement empêche-t-il les coalitions, ou garde-t-il de la chute aux extrêmes ? Mais on ajoute : « Par le scrutin de liste, la minorité est sacrifiée. » Ne l’est-elle donc pas par le scrutin d’arrondissement ?
Les partisans du scrutin de liste répliquent : « Avec le scrutin d’arrondissement, les élections, à y bien regarder, n’ont point de sens politique, ou elles en ont peu, ou elles en ont moins qu’avec le scrutin départemental : elles ne déterminent point de courant politique. » — « Tant mieux ! tant mieux ! s’écrient les autres : avec le scrutin uninominal il n’y a pas, comme vous dites, de courant politique, mais il n’y a pas de crues subites et de débordemens : c’est un petit Hot qui coule lentement, mais sûrement ; qui dort un peu, mais auquel on peut sans