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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 130.djvu/863

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céleste de Laplace ; plus tard, elles fourniront à Poisson et à Navier les lois générales de l’élasticité des corps solides. Cependant, un petit groupe de philosophes, fidèles aux principes essentiels de là doctrine de Descartes, développe la théorie de la force expansive des gaz que Parent avait esquissée. C’est en Suisse que fleurit, isolée au milieu de l’Europe newtonienne, cette école que l’on pourrait justement nommer l’École des BernouUi.

L’amitié qui unissait Leibniz aux chefs de la famille Bernoulli explique sans doute les tendances antinewtoniennes de cette grande famille de géomètres, tendance bien vivace, que Daniel et Jean II Bernoulli proclamaient encore en 1746 : « Tout se fait dans le monde par la matière et le mouvement, écrivaient-ils. Ce principe de Descartes a quelque chose de frappant, et il paraît si clair au premier abord qu’on peut s’étonner qu’il ait été contesté, je ne dirai pas par quelques-uns des anciens philosophes, mais par nos plus grands philosophes modernes, tels que Newton, et un grand nombre d’autres que son autorité a entraînés et qui tous ont introduit le principe de l’attraction mutuelle de la matière, existante et innée dans la matière même et produite uniquement par la volonté immédiate et efficace de Dieu. Ce principe ne passe-t-il pas notre raison? « 

Dès 1683, Jacques Bernoulli, à l’imitation de Leibniz, cherche dans les mouvemens tourbillonnaires de la matière subtile l’explication de l’élasticité de tous les corps; pour lui, comme pour Malebranche, la gravitation de l’éther cause la cohésion des corps durs; la pression de l’air n’est pas seulement l’effet de son poids, mais aussi de sa « résistance passive » ; et cette résistance passive, analogue à l’élater de Leibnitz, est elle-même produite par la gravitation de la matière éthérée.

Son frère, Jean I Bernoulli, développe et précise cette idée. En 1724, l’Académie des sciences avait proposé comme sujet de prix la détermination des lois de la communication du mouvement entre corps parfaitement durs ; Jean Bernoulli interpréta ce mot dur dans le sens d’élastique, et saisit cette occasion d’exposer, au sujet de l’élasticité, une hypothèse analogue à celle de Malebranche, de Leibniz, de Jacques Bernoulli. L’interprétation qu’il avait donnée à la question de l’Académie ne fut point approuvée et sa pièce fut rejetée ; mais il fut plus heureux lorsqu’on mit au concours, pour l’année 1726, les lois du choc des corps à ressort.

« Tous les physiciens, dit Jean Bernoulli, admettent une matière subtile qui, par son mouvement, soit la cause première du ressort des corps, » Ce qu’il sagit de découvrir, ce sont les