Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 131.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de manger des grappes qui ont été éclaboussées par la mixture cuivrique.

Quand le mildew se développa dans le Médoc, on remarqua, non sans étonnement, que les bordures des pièces couvertes des taches de chaux et d’oxyde de cuivre étaient moins fortement atteintes par la maladie que le milieu qui n’avait pas subi le même traitement. Ces observations, dues à M. Jouet, ancien élève de Grignon et de l’Institut agronomique, conduisirent M. Millardet, professeur à la Faculté de Bordeaux, à la préparation du mélange de chaux et de sulfate de cuivre, connu sous le nom de bouillie bordelaise.

L’action des sels de cuivre sur les champignons avait été observée à diverses reprises : Benedict Prévost, au commencement du siècle, avait préconisé l’emploi du sulfate de cuivre contre la carie du blé, et dans son mémorable mémoire sur l’Aspergillus niger M. Raulin avait également reconnu que, si cette petite plante ne fournit ses récoltes maxima que, dans des liquides renfermant, outre les matières nutritives habituelles, de très faibles quantités de sels de zinc et de fer, il suffit d’une trace d’un sel de cuivre pour amener sa mort.

M. Millardet fit une étude détaillée du traitement, insista particulièrement sur son efficacité quand il est préventif, quand il est appliqué avant toute apparition de la maladie… tous les vignerons soigneux utilisent aujourd’hui les bouillies cuivriques. Or, le mildew (peronospora viticola), appartient à la même famille que le phytophtora infestans de la pomme de terre, et dès 1885, M. Prillieux prévit que le mode de traitement eflicace contre un de ces champignons devait l’être sur l’autre ; les essais furent tentés à Joinville-le-Pont, au champ d’expériences de l’Institut agronomique, en 1888, et les résultats furent décisifs. Tandis que les sujets traités par la bouillie cuivrique ne portèrent que des tubercules sains, on trouva un tiers des tubercules atteints au pied des sujets non traités.

M. Aimé Girard continua cette étude et reconnut que si le traitement trop retardé porte sur des cultures déjà atteintes, il ne les préserve pas absolument, mais restreint dans une large mesure les ravages de la maladie ; ainsi, en 1888, les tubercules attaqués furent, en général, de 3 à 4 pour 100 sur les parties traitées, au maximum de 7 pour 100, tandis que des cultures des mêmes espèces non traitées subirent des pertes beaucoup plus considérables, s’élevant jusqu’à 20 ou 22 pour 100 de la récolte.

En appliquant à la pomme de terres le traitement préventif, également recommandé pour les vignobles, on réussit en 1889 à préserver complètement les cultures ; la dépense s’éleva à 35 ou