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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 131.djvu/649

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que la nouvelle religion faisait naître le goût des sciences, des arts, et propageait les procédés industriels de la Chine. Quand Shotokou mourut (622), les luttes religieuses avaient pris fin. Toutefois la révolution n’était qu’ébauchée ; le soin de lui donner une application pratique devait appartenir à trois princes éminens qui se succédèrent à peu d’intervalle : Tenchi-Tenno, Temmou-Tenno et Mommou-Tenno.

Le premier, Tenchi-Tenno, gouverna de 642 à 670, d’abord comme prince impérial, puis comme empereur. C’était une façon de poète et de savant ; mais son plus beau titre de gloire est dans son œuvre politique et législative. Il créa toute une organisation administrative sur un plan dont nous ne possédons que quelques traits, mais qui suffisent à donner la plus haute idée de son intelligence. Il constitua à ses sujets un état civil régulier, ordonna que chacun prît un nom distinct et fit procéder à un recensement général. La population fut répartie par groupes de cinquante familles : le chef de chaque groupe était chargé de maintenir l’ordre et de tenir à jour les registres d’état civil. Puis il institua un système unique de poids et mesures. De tels règlemens s’imposaient comme la base d’une administration bien ordonnée et la condition nécessaire des réformes militaires et financières. Le seul fait d’en avoir compris l’opportunité mériterait à leur auteur une place dans l’histoire.

Le même prince fit rédiger un code en vingt-deux volumes. Ce code a complètement péri, mais peut-être cette perte n’est-elle pas trop à regretter. La tentative en effet devait être prématurée, et la plus grande partie de l’ouvrage dut passer dans les lois de 701, qu’on possède et que nous analyserons plus loin. Nous glisserons sur les mesures de détail qui accompagnent ces grandes réformes. Certaines d’entre elles cependant ne laissent pas que d’ajouter à la gloire de ce prince. C’est ainsi qu’on le voit renouveler l’interdiction d’enterrer vifs les esclaves sur la tombe des nobles. C’est encore lui qui s’occupa de distribuer, entre les agriculteurs, l’eau nécessaire aux irrigations.

Bien qu’inférieur au précédent, l’empereur Temmou (673-685) sut continuer son œuvre. Il institua une commission législative en lui recommandant de ne pas se montrer trop radicale en matière d’innovations, centralisa les services administratifs de l’armée, encouragea l’enseignement des sciences, notamment par la fondation d’un observatoire astronomique, et donna aux bonzes l’appui du pouvoir civil. Peut-être à cet égard alla-t-il un peu trop loin ; car on le voit s’immiscer dans les questions de dogme et, par exemple, interdire à ses sujets de manger la chair des animaux domestiques.