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Dans un pays qui semble n’avoir guère connu le régime pastoral, la propriété mobilière devait compter pour bien peu de chose. Quant à la propriété foncière perpétuelle, elle n’existait qu’à l’état d’exception. Tous les six ans avaient lieu des partages de terres entre les familles. La part de chacune variait avec le nombre, l’âge et le sexe de ses membres. On retrouve là les traits essentiels du mir russe et des institutions qui ont persisté dans la race slave. Ces analogies sont d’ailleurs assez naturelles chez des peuples qui semblent avoir eu pour berceau les mêmes régions.

L’autorité du monarque était sans limite : sa seule volonté faisait et défaisait la loi. Il subissait toutefois, comme tous les souverains absolus, l’influence de son entourage et devait compter avec les intrigues de palais. Tout le Japon central et méridional reconnaissait son pouvoir : le Nord était encore indépendant.

Les huit ministres qui se partageaient l’administration avaient au-dessus d’eux un conseil politique, composé de cinq à six personnes. Tandis que la guerre, la marine et les affaires étrangères se trouvaient groupées dans un seul ministère, dit des relations extérieures, les rites, cérémonies, traditions, généalogies et fêtes civiles ou religieuses, prenant une importance capitale, occupaient quatre ou cinq ministres.

Depuis 710, le gouvernement, jusque-là nomade, avait dû adopter un siège fixe.

Les ressources indispensables à une cour déjà luxueuse et au fonctionnement déjà compliqué des divers services provenaient : 1° du domaine territorial de l’empereur; 2° des impôts; 3° des corvées et de quelques privilèges, dont le plus important était le droit de battre monnaie. L’empereur, outre ses droits sur toutes ou presque toutes les terres du pays, avait un domaine propre, qu’il faisait cultiver, pour en tirer des revenus, sans doute modiques.

Les impôts formaient l’aliment principal du trésor. L’impôt foncier seul fournissait plus des trois quarts du revenu total. Le cultivateur payait de 3 à 4 pour 100 du produit présumé de sa terre. Pour la plus grande part, l’impôt était perçu en riz. Le fisc n’avait pas l’âpreté qu’il montre dans nos sociétés modernes. Les exemptions sont fréquentes : tantôt on dégrève toute une région pour mauvaise récolte, tantôt tel ou tel cultivateur, pour récompenser ses services ou encourager des défrichemens. Plus souvent encore le fisc accorde des délais. Cependant les charges, si légères en apparence, devaient, en certaines années, paraître trop lourdes aux imposés (n’oublions pas qu’elles étaient calculées sur le produit présumé de la terre) : car nous voyons les paysans,