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même Celtes, au sens ethnique du mot, et qui ne pouvaient donc appartenir qu’à la race germano-scandinave? Au reste, Strabon dit formellement que les hommes de race gallique ressemblent aux Germains sous le rapport physique, ont les mêmes institutions, reconnaissent la même origine. Et ce n’est pas seulement Strabon, c’est aussi César, c’est Diodore de Sicile qui nous disent que « les Gaulois étaient de grande taille, avec la peau blanche et les cheveux blonds ». Or, ce n’est pas là un portrait de Celto-Slaves, c’est un portrait de race septentrionale qui s’appliquerait tout aussi bien aux Germains[1]. Diodore ajoute que les Gaulois sont d’un aspect effrayant ; ils ont la voix forte et rude ; « ils parlent peu », habitude plus germanique que celtique; ils s’expriment par énigmes et affectent dans leur langage de laisser deviner la plupart des choses. Ils emploient beaucoup l’hyperbole, soit pour se vanter eux-mêmes, soit pour abaisser les autres. Dans leurs discours, ils sont menaçans, hautains et portés au tragique. Tous ces traits sont encore plus applicables aux Scandinaves et aux Germains qu’aux Celto-Slaves. De même, quand Diodore nous montre ces corps gigantesques, d’aspect effrayant, protégés par des boucliers hauts comme un homme, portant d’énormes casques d’airain ornés de cornes ou de figures en relief d’oiseaux et de quadrupèdes, combattant les uns nus, les autres sous des cuirasses de fer, maniant avec une aisance herculéenne des épées qui ne sont « guère moins grandes que le javelot des autres nations », ou lançant de lourdes piques « qui ont les pointes plus longues que leurs épées, » comment méconnaître que, bien avant l’arrivée des francs, les Gaulois offraient déjà le type du nord-ouest très caractérisé, bien plus que le type celto-slave? Et c’est ce que confirment de tous points les découvertes relatives aux crânes de l’époque.

Aujourd’hui encore, les individus grands, blonds et aux yeux clairs, à tête allongée, descendans des Galates ou Kymris, des Belges, des francs, des Normands, se trouvent dans le nord, dans l’est et dans le nord-ouest de la France. Les départemens du sud et de

  1. Les vrais Celtes ont la région antérieure du crâne large et saillante; leurs cheveux lisses et plats, non bouclés, sont blonds ou châtain-clair dans l’enfance, mais, dans l’âge adulte, deviennent bruns ou d’un châtain plus ou moins foncé. Entre le nez et le front se trouve une dépression assez considérable. Les yeux sont d’un brun plus ou moins clair; la face est large, le teint souvent frais et coloré, le menton arrondi; le cou est assez court; les épaules larges et horizontalement placées; la poitrine est large et développée; les courbes rachidiennes, cervicale, dorsale et lombaire, sont peu prononcées; les membres sont bien musclés, mais leurs formes, ainsi que celles du tronc, sont un peu courtes et trapues ; enfin la taille est médiocre et tout le développement a lieu en largeur plutôt qu’en hauteur. Les Celtes de Bretagne, d’Auvergne, des Cévennes et de Savoie peuvent donner une idée de ce type.