Notre siècle a été favorable à la littérature fantastique. Elle y a eu sa Renaissance, dont nous n’avons peut-être encore vu que l’aurore. L’honneur de cette nouvelle floraison revient tout d’abord à la science. Chez beaucoup d’êtres humains, un obscur instinct tend à admettre la contingence des lois de la nature dans le monde où nous vivons, et la science moderne est en train de leur donner quelque apparence de raison. Quand elle nous enseigne qu’une légère altération de notre rétine ferait le monde à jamais décoloré, elle encourage le vague pressentiment que le monde réel pourrait bien n’être qu’une apparence. Quand elle nous entretient de créatures douées d’organes et de sens différens des nôtres, elle suggère la pensée qu’il doit y avoir autant d’apparences de mondes que de formes d’yeux et de variétés d’entendement. La science devient ainsi l’alliée, et, plus encore, l’inspiratrice de l’écrivain fantastique : elle l’encourage à rêver de mondes imaginaires en lui parlant sans cesse de mondes ignorés.
Hoffmann — dans ses bons jours — a été le grand rénovateur d’un genre qui n’avait pas varié ses formules depuis le moyen âge, même dans Faust. Il a épuré le fantastique en le séparant du merveilleux. Selon la belle expression de Barbey