catholicisme. Ce fut elle, peut-être, qui lui inspira un de ses ouvrages les plus singuliers, la Prosopopée, ou les Larmes de la sainte et bienheureuse Marie, mère de Dieu. Et peut-être est-ce encore sous son influence que le poète, dans les dernières années du XVIe siècle, renonça définitivement aux lettres pour s’essayer dans une autre carrière. Toujours est-il qu’on le retrouve, vers 1600, étudiant à l’Université d’Avignon, d’où il revient, en 1602, avec le grade de docteur en médecine. En 1616, un acte officiel autorise « Thomas Lodge, docteur en médecine, et Henri Sewell, gentleman, à voyager dans les pays de l’Archiduc, pour y recouvrer des créances qui leur sont dues, sous condition d’être de retour au bout de cinq mois. » Cinq mois après, Lodge, rentrant en Angleterre, est arrêté et emprisonné : remis en liberté, il s’expatrie, va exercer la médecine dans les Pays-Bas. Et de nouveau nous le trouvons pratiquant à Londres, cité parmi les premiers médecins de l’Angleterre. Il meurt de la peste, en 1625, à soixante-dix-huit ans.
Voici maintenant deux contemporains de Charles Ier, Robert Herrick et Richard Crashaw, les deux figures les plus opposées qui se puissent imaginer.
Robert Herrick est le type parfait de l’épicurien. Vivant une grasse vie, dans son presbytère de Dean Prior, il n’a point d’autre souci que de bien manger et d’écrire de beaux vers. « Je ne crains, dit-il, aucune puissance terrestre — et ne m’inquiète que de couronnes de fleurs. — J’aime avoir ma barbe — enduite d’huile et de vin. — Et je veux aujourd’hui noyer toute tristesse : — qui sait s’il vivra le jour suivant ? » Ou encore : « Dans les matinées sobres, n’essaie pas de prêter l’oreille — à l’enchantement sacré d’un poème ; — mais quand tu auras à la fois bien mangé et bien bu — c’est alors que tu pourras lire ou chanter mes vers. »
Ce qui n’empêche pas ses vers d’être vraiment très beaux, à la fois lyriques et simples, rappelant encore par leur forme l’euphuisme de Lodge, mais avec un accent tout moderne de naturel et d’intimité. Le règne de Charles Ier vit surgir d’ailleurs tout un groupe de brillans poètes. « Nous ne pouvons concevoir, dit M. Gosse, à quel degré de perfection formelle serait parvenue la littérature anglaise, si les poètes royalistes n’avaient pas été distraits par des événemens plus graves de l’agréable soin de polir leurs vers. Mais il se trouve en fait qu’un seul d’entre eux n’a point subi le contre-coup de la crise politique. Pour ce qui est des autres, les plus faibles, tels que Lovelace, en ont été complètement brisés ; les plus forts, comme Suckling, se sont jetés tout entiers dans la lutte des partis. Seul Herrick, avec une sérénité imperturbable, a continué à siffler ses petites chansons pastorales, et à se couronner la tête de narcisses, tandis que l’Angleterre s’abîmait sous