une composition française, dissertation ou discours, analyse littéraire ou narration familière, que d’avoir un peu d’étude ou de talent ? et où sont-ils ces préparateurs qui connaissent le rare secret d’enseigner l’art de faire une version latine sans savoir un peu de latin ? J’ai fabriqué moi-même des bacheliers, au temps de ma jeunesse, — à peu près comme on fabrique en Sorbonne aujourd’hui des licenciés ou des agrégés, — et nous n’avons ensemble usé d’autre artifice que de faire beaucoup de versions latines et beaucoup de compositions françaises. Dira-t-on là-dessus que c’est là justement l’artifice ; qu’il consiste à « forcer » en quelque sorte la plante humaine ; que la « mécanique » est de suppléer, par la répétition d’un exercice, à ce qu’il exigerait, pour être fait « naturellement », de patience et de longueur de temps ? La réponse n’est que trop facile ! et ce qui est alors « artificiel » ou « mécanique » dans notre système d’enseignement, ce n’est pas la préparation du baccalauréat, mais, — sans parler de celle de l’examen d’entrée des grandes écoles, — c’est justement la préparation des licences et des agrégations. Oui, ce qui est « artificiel » et « mécanique », c’est de seriner deux ou trois ans durant et même davantage, on l’a vu ! les mêmes leçons aux mêmes candidats ; c’est de les parquer, en quelque sorte, et de les emprisonner, deux ou trois ans durant, dans le même cours d’Histoire ancienne ou de Trigonométrie ; c’est de leur faire faire, deux ou trois ans durant, les mêmes Thèmes grecs ou les mêmes Manipulations de chimie. Quelqu’un a-t-il ici quelque remède à nous proposer ? Pour moi, si l’on veut abuser du mot et le détourner de son vrai sens, je me charge encore de montrer qu’il n’y aura rien de plus mécanique, » ou de plus « artificiel, » que les moyens dont il faut pourtant bien qu’on use pour préparer un militaire, un médecin, un commerçant. Mais s’il convient sans doute, en bon français, de n’appliquer ce nom d’« artificiels » qu’à des moyens détournés, illégitimes ou déloyaux, je répète qu’il n’y en a pas de tels pour mettre un jeune homme en état de traduire une page de Tacite ou de disserter convenablement sur la réalité du monde extérieur. Il faut, encore une fois, qu’il ait fait un peu de latin et un peu de philosophie ! Ce qui se résume à dire que la préparation du baccalauréat n’a rien en soi de plus « mécanique » ou de plus « artificiel » que la préparation de n’importe quel autre examen, et ceux qui prétendent le contraire ont bien pu décerner des diplômes et « faire » ainsi des bacheliers ; ils n’en ont jamais « fabriqué ».
D’où vient cependant la faiblesse des résultats ? De l’affaiblissement lui-même des études, nous l’avons déjà dit tout à l’heure ; et encore, si l’on le veut, d’une habitude que l’administration a