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lequel il tendait ? Ne disait-il pas en termes très clairs : « Dans ce congrès de Berlin qui va s’ouvrir et dont les solutions inquiètent à bon droit tant d’intérêts européens, donnons à l’Autriche l’appui loyal et complet de notre diplomatie, mais qu’elle nous donne à son tour ce qu’elle nous doit[1] » ? Or, qu’est-ce que l’Autriche « devait aux Italiens » ? Leur frontière, et ceux de leurs frères italiens qui étaient et sont encore sous son sceptre. Et l’on objecterait en vain que, pour le Triestin et le Trentin, c’est une question de nationalité autant que de frontière ; car, ainsi qu’il est aisé de l’établir, la même parité de raison de frontière et de nationalité pouvait être invoquée par la France à propos de la Savoie et de Nice aussi.

Pourtant cette question de Nice et de la Savoie a été, comme celle de la paix de Villafranca et celle de la politique française, dans l’annexion de l’Italie centrale, l’un des grands griefs qui ont le plus passionné les esprits italiens contre la France. C’est pourquoi, avant d’aborder l’examen des faits qui en ont déterminé la solution, j’ai cru nécessaire d’en exposer l’indiscutable caractère de moralité et de justice. En intervertissant ainsi l’ordre de la discussion, j’ai peut-être violé les règles de toute bonne rhétorique, lesquelles réservent habituellement pour la péroraison l’argument culminant d’une démonstration. Mais j’espère que la mienne y aura gagné en clarté ; et, dans une question qui a été tant obscurcie par la mauvaise foi des adversaires de la France, la clarté me paraissait devoir être le meilleur et le plus sûr élément de conviction pour le lecteur.


G. GIACOMETTI.

  1. Séance du 9 avril 1878.