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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 134.djvu/282

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LE MOUVEMENT IDÉALISTE
EN FRANCE

Après avoir traversé une période où, selon le mot d’Auguste Comte, l’intelligence était en insurrection contre le cœur, nous entrons dans une autre où le cœur est en insurrection contre l’intelligence. Ce que nous aimons et voulons n’est pas ce que, sur l’autorité de la science, nous jugions être la réalité. Nous concevons mieux, nous désirons mieux, alors même que nous ne pourrions encore formuler avec précision l’objet de notre pensée et de notre désir. Le résultat apparent d’un tel état des esprits, c’est l’anarchie intellectuelle et morale. Pourtant, cette apparence n’est-elle point superficielle et trompeuse ? Si l’on regarde au fond des choses, ne découvre-t-on pas, comme résultante de tant de mouvemens en apparence désordonnés, une direction précise et, en somme, un progrès ? Quelle est cette direction ? Ne pré-pare-t-elle point une réconciliation de la science mieux interprétée avec la morale mieux comprise, et n’est-ce pas par l’intermédiaire de la philosophie que cette réconciliation doit se produire ? Notre intention est de montrer ici les origines du mouvement idéaliste, les résultats qui nous semblent désormais acquis, enfin l’orientation des esprits vers ces buts élevés qu’on ne fait encore qu’entrevoir, vers ces sommets lumineux qui semblent émerger d’une mer de nuages.


I

Rarement en France on assista à pareil labeur des philosophes. Les productions dans l’ordre de la psychologie, de la