Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 134.djvu/413

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Ogadine italien, aux stipulations de l’acte général de Berlin et de la déclaration de Bruxelles relatives à la liberté du commerce. En outre, dans le port de Zéila, il doit y avoir égalité de traitement pour les sujets et protégés des deux nations en ce qui concerne leurs personnes, leurs biens, et l’exercice de leur commerce et de leur industrie. En somme, tout le bastion formé par la grande corne orientale africaine dont le cap Guardafui constitue le front saillant fut reconnu possession italienne. Depuis le cap Hafoun jusqu’au 49e longitude est de Greenwich, c’est un développement de côtes d’environ 400 kilomètres dont ils ont bénéficié. Dans leur ensemble, les territoires somalis aujourd’hui soumis à l’influence italienne s’étendent sans interruption depuis le fleuve Juba presque sous l’équateur, jusqu’au-delà du cap Guardafui vers le 49e de longitude est, sur le littoral du golfe d’Aden, et atteignent un développement de côtes d’environ 2 000 kilomètres.


IV

Si l’Italie eût été prudente et sage, elle eût dû rester pour le moment sur les avantages que lui avaient acquis ces traités. Le souci de sa situation militaire en Europe ; ses ressources financières précaires, son état économique peu brillant, eussent du inspirer la ligne de conduite qui était à suivre en Afrique. Installée solidement à Asmara. à Kéren et à Massaouah, munie de traités qui lui assuraient un vaste hinterland pour l’avenir, elle eût pu adopter une politique expectante et ajourner toute idée d’extension ultérieure jusqu’à l’époque où, devenue plus forte sur le terrain économique et militaire, elle se serait trouvée en mesure de faire correspondre ses moyens d’action à ses hautes visées. D’ici là d’ailleurs sa politique d’expansion coloniale ne fût pas restée complètement inactive. Elle eût pu chercher à consolider sa position juridique vis-à-vis de la France en s’entendant avec cette dernière pour fixer les limites du territoire italien d’Assab et de la colonie française d’Obock et pour concilier de communes prétentions sur le Harrar. Elle eût pu faire œuvre colonisatrice en détournant sur le plateau érythréen quelques-uns de ces émigrans qui chaque année vont se perdre en Amérique sans profit pour la métropole, et en attirant à Massaouah une partie du commerce éthiopien. Vis-à-vis des indigènes qui pouvaient s’opposer à son expansion future, elle eût continué à user de la tactique qui lui avait si bien réussi jusqu’alors, et cherché à diviser pour mieux régner. Elle eût entretenu les mésintelligences qui sont à l’état chronique entre le négus et ses ras. Surtout elle