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LES FÊTES DE MAI
ET LES
COMMENCEMENS DE LA POÉSIE LYRIQUE AU MOYEN ÂGE

Alfred Jeanroy, les Origines de la poésie lyrique en France au moyen âge, études de littérature française et comparée ; Paris, Hachette, 1889. — Gaston Paris, Compte rendu critique du livre de M. A. Jeanroy, Journal des Savans, novembre et décembre 1891, mars et juillet 1892 : tiré à part, Paris, Bouillon, 1892.

S’il faut en croire une récente théorie, la poésie lyrique est issue en France, dans le haut moyen âge, des fêtes de mai. En la période antérieure à la première croisade, tandis que sur les prairies limousines et poitevines des jeunes filles et des jeunes femmes célébraient, selon de vieux rites, la « venue du temps clair », la griserie du renouveau a noué leurs mains et rythmé leurs pas pour la première danse ; l’émoi que le printemps met aux cœurs a éveillé sur leurs lèvres la première chanson ; et de ce germe procède toute la floraison lyrique des âges suivans. Ainsi la poésie serait sur notre sol, en sa plus lointaine origine, une émanation du Printemps et comme son âme sonore.

Si c’était là une légende, elle séduirait par sa grâce, et certes la Grèce n’a pas su trouver, pour dire la naissance des Muses, de plus fraîches fictions. Mais ce n’est pas un mythe de poètes, c’est une théorie de philologues : curieuse par son pittoresque, mais plus encore par la structure imprévue des groupemens de faits multiples, menus, complexes, qui ont provoqué l’hypothèse et qui la soutiennent.

Elle se pose d’abord dans un beau livre de M. Alfred Jeanroy : il s’agit, selon la promesse du titre, d’exposer les Origines de la poésie lyrique en France ; or, ici comme partout, nous n’atteignons