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dans le pays ; elle ne donne des chiffres que pour l’exportation ; nous voyons que nous expédions des œufs pour une valeur variant de 20 à 30 millions de francs chaque année, et que notre commerce de volailles mortes ne s’élève qu’à 2 millions environ.

C’est là ce qui me paraît pouvoir croître et considérablement, en utilisant les grandes quantités de grain qui pèsent sur le marché ; je croirais d’autant plus que cet élevage est appelé à un brillant avenir que nous pouvons y développer les qualités d’adresse, d’habileté à obtenir le parfait, l’excellent, qui caractérise nos productions.

Il est donc possible que le bas prix du blé conduise à lui trouver de nouveaux emplois assez fructueux pour que, la demande surpassant l’offre, la baisse soit enrayée.

Les prix, enfin, sont-ils invariablement fixés ? N’avons-nous pas vu, déjà, les périodes de hausse succéder à la baisse, et ce qui s’est passé naguère ne peut-il pas se reproduire maintenant ?

Ces fluctuations de prix sont curieuses à suivre ; dans le mémoire que nous avons déjà cité, M. D. Zolla donne le relevé des cours du froment à la Grenette de Bourg, dans l’Ain, pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle, et bien que ce ne soit là qu’un exemple particulier, les oscillations des prix sont intéressantes à connaître.

De 1741 à 1765, les prix restent très bas. Au début le grain est vendu seulement 8 fr. 60 l’hectolitre, et, après s’être élevé à 13 fr. 90 de 1746 à 1750, il retombe à 9 fr. 80 à la fin de la période ; le cours moyen de ces vingt-cinq ans n’est que de 11 fr. 10. A partir de 1766 les prix s’élèvent, et la moyenne des vingt-cinq ans écoulés de 1766 à 1790 est de 16 fr. 30 ; pendant les trente années suivantes le mouvement ascensionnel se continue, et la moyenne des prix atteint pour la France entière 22 fr. 93.

De 1820 à 1850 se place une période de baisse, où le prix moyen est de 19 francs l’hectolitre ; les producteurs s’inquiètent, accusent l’importation étrangère, et leurs clameurs décident l’établissement de l’échelle mobile. De 1851 à 1875, bien que pendant la fin de la période le grain étranger entre en franchise, la hausse se produit, l’hectolitre vaut en moyenne 22 fr. 71, mais pendant les vingt années suivantes, le prix tombe à 19 fr. 23 ; cette baisse au reste n’est pas particulière à la France, elle se manifeste aussi bien en Angleterre qu’en Allemagne.

Ainsi qu’il a été dit déjà, ces fluctuations du marché n’ont aucun rapport avec les importations ; celles-ci ne commencent à se produire que sous la Restauration et ne sont considérables qu’aux époques de cherté, quand le haut prix du grain assure aux importateurs de larges bénéfices.