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Est-il donc impossible d’avoir sur les causes des énormes oscillations du marché des grains quelque lumière ? Le prix d’une marchandise varie avec son abondance ou sa rareté, mais aussi avec l’abondance ou la rareté des métaux précieux qui servent à l’acquérir. Si d’une année à l’autre la quantité du métal monétaire reste fixe, j’en donnerai moins si le grain est abondant que s’il est rare ; et réciproquement si la quantité de blé reste invariable, mais que le poids des métaux précieux mis en circulation augmente, j’en donnerai plus pour avoir le même poids de grain ; la hausse est déterminée, soit par la rareté de la marchandise à acquérir, soit par l’abondance de la matière qui sert à solder les achats, et la baisse par les contraires ; et il est curieux de constater que la hausse de la fin du XVIIIe siècle coïncide avec l’introduction en Europe d’une masse considérable d’argent extraite dans l’Amérique espagnole, que celle de 1850 suit la découverte et l’exploitation de l’or en Californie.

La baisse actuelle paraît être due à une cause du même ordre bien qu’opposée. A partir de 1873 plusieurs États deviennent monométallistes ; l’énorme quantité d’argent employée jusqu’alors aux échanges internationaux cesse d’avoir cours légal ; l’or reste seul, sa quantité est insuffisante, on en donne moins pour une même quantité de marchandises, qu’on n’en donnait quelques années auparavant : la baisse se produit.

L’Europe trouvera-t-elle le moyen de rendre à l’argent le rôle qu’il a rempli conjointement avec l’or pendant tant d’années ? Les mines d’or exploitées dans l’Afrique méridionale vont-elles jeter sur le marché une quantité de métal précieux suffisante pour combler le vide qu’a fait le retrait de la monnaie d’argent ? Ce sont là des questions que je ne saurais discuter, car elles sortent du domaine de l’agronomie.

Sa mission était de faire produire à la France une quantité de blé suffisante pour assurer l’alimentation publique. Or, tandis que, de 1820 à 1824, la culture du blé ne s’étendait que sur 4 800 000 hectares, le rendement était seulement de 11hect, 4, — de telle sorte que la récolte totale ne dépassant guère 57 millions d’hectolitres, laissait une partie de la population privée de pain de froment, — cette culture s’étend aujourd’hui sur près de 7 millions d’hectares, le rendement atteint 17 hectolitres, la quantité produite suffit presque à une consommation qui dépasse 100 millions d’hectolitres, et c’est là un progrès dont la culture française a lieu de s’enorgueillir.


P. -P. DEHERAIN.