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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 135.djvu/400

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surtout pour une minorité comme les catholiques : ce fut l’œuvre de Manning. La preuve qu’il y réussit, c’est d’abord le spectacle de ces grandes et belles écoles où il y a place pour tous les enfans catholiques du diocèse. C’est ensuite le rôle important que l’archevêque de Westminster joua dans la grande commission d’enquête sur l’enseignement primaire où il fut vraiment l’inspirateur des conclusions du rapport en faveur de l’amendement de la loi de 1870. C’est enfin le projet qui vient d’être déposé à la Chambre des communes et où le cardinal Vaughan et ses suffragans, en dépit de beaucoup de lacunes, saluent un effort sincère pour donner satisfaction aux revendications de l’Eglise.

Manning, du reste, ne se borna point à cette activité en quelque sorte professionnelle. L’homme qui disait qu’une larme d’enfant non essuyée criait à Dieu aussi haut que le sang répandu à terre, était le patron-né de toutes les œuvres de protection, de sauvetage et de défense de l’enfance. Il collabora, en particulier, avec un zèle sans égal avec la grande société non confessionnelle fondée et dirigée par un pasteur dissident, le révérend Benjamin Waugh, pour prévenir et réprimer la cruauté contre les enfans. Quand le rédacteur de la Pall Mail Gazette entreprit sa campagne contre la sensualité criminelle et ses attentats contre les mineurs, M. Stead n’eut pas de caution et de garant plus intrépide que le cardinal-archevêque. Cette façon de se commettre avec quiconque se montrait animé d’un esprit vraiment généreux et paraissait disposé à servir l’humanité, scandalisait fort une partie de l’entourage de Manning. Ceux qui s’imaginèrent pouvoir lui donner une leçon sur le danger de ces accointances n’y revinrent pas : le prêtre, le prélat, le prince se redressa et les remit à la place qu’ils n’auraient pas dû quitter.

Cependant toute cette activité ne pouvait manquer de porter ses fruits dans un esprit comme celui de Manning, accessible jusqu’à la fin aux enseignemens de l’expérience. En politique, son point de départ avait été celui d’un conservateur pur, d’un tory de la stricte observance. Tant qu’il demeura anglican, il resta fidèle à ce parti. Il envisageait toutes les questions sous le rapport de l’église nationale. L’ecclésiasticisme étouffait en lui le christianisme et ses inspirations. Tout changea après sa conversion. Il n’était plus membre de l’Église d’Angleterre, mais de l’Eglise en Angleterre. Le pouvoir civil n’était plus pour lui le protecteur-né, en même temps que le régulateur du pouvoir spirituel. Avec la logique de son esprit, il ne tarda pas à modifier profondément ses conclusions sur tous les points. Il s’appelait lui-même un radical mosaïque, un disciple de Moïse, pour indiquer à la fois le conservatisme fondamental de ces opinions avancées