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gradué qui, parlant de zéro quand le cours moyen des marchés français serait de 30 francs le quintal, s’élèverait automatiquement, centime par centime, inversement du cours moyen de nos marchés, à mesure que ce cours moyen descendrait au-dessous de M francs (le cours étant actuellement de 10 fr., le droit devrait être de 11 fr.). Ils demandent encore une large diminution des impôts ruraux, le vote du projet de loi du cadenas, la limitation à trois mois de la durée de l’entrepôt pour les blés et farines, l’établissement d’une taxe d’entrepôt de 1 franc par quintal et par mois sur les blés en entrepôt, et une taxe proportionnelle sur les farines ; la suppression des entrepôts fictifs, l’observation rigoureuse de la législation sur les admissions temporaires. Ils désirent aussi que les droits de douane soient majorés de surtaxes différentielles selon l’écart du change entre la France et chacun des pays, exportateurs de blé, chez lesquels circule une monnaie dépréciée.

Les pouvoirs publics ne sont pas restés tout à fait indifférens à ces sommations. Le 15 novembre 1895, le ministre de l’agriculture, conférant avec la commission parlementaire des douanes sur le projet de loi du cadenas et sur les modifications à apporter nu régime des entrepôts et des admissions temporaires, promettait de demander la mise de ces projets à l’ordre du jour de la Chambre dans le plus bref délai. Mais les amis des agriculteurs et le gouvernement se sont heurtés à une très vive résistance du commerce qui supporte impatiemment les entraves de toute sorte dont on a entouré depuis 1891 sa liberté d’expansion. On sait que le « cadenas » a pour but d’empêcher certaines spéculations sur les marchandises à importer au moment où les Chambres viennent à être saisies d’une demande d’augmentation des droits. Bien que le projet eût surtout en vue les spéculations sur les céréales, il n’était pas, en son premier texte, limitatif, et pouvait atteindre tous les genres de marchandises. Le gouvernement, inquiet de l’opposition du monde commercial, abandonna ce projet pour se rallier à une proposition limitative. La faculté de percevoir immédiatement, quoique à titre provisoire, les nouveaux droits éventuellement proposés ne serait accordée à l’administration des douanes qu’autant que ces droits s’appliqueraient aux céréales ou à leurs dérivés, aux vins, aux bestiaux ou aux viandes abattues.

Le ministre du commerce s’est déclaré d’accord sur la nouvelle rédaction avec son collègue de l’agriculture, et le 19 janvier 1896, celui-ci, parlant à Douai devant la Société des agriculteurs du Nord, soutenait, au nom du gouvernement, la loi du cadenas sous sa nouvelle forme. Le monde agricole a salué avec