sur les masses électorales. Lorsque M. Reid arriva au pouvoir, en 1894, il était nettement investi par le pays de la mission d’abaisser le tarif douanier. Non content de déposer une loi dans ce sens et de proposer l’établissement d’impôts directs, — foncier et sur le revenu — pour maintenir les recettes budgétaires, il compliqua la réforme en rendant ces impôts progressifs, en exemptant tous les revenus inférieurs à 7 500 francs. Il se refusa à toute concession à l’égard de la Chambre haute qui désapprouvait ces excès démagogiques, en appela aux électeurs, et, cette fois, ajouta à son programme la réduction à cinq ans du mandat, jusqu’alors à vie, des membres de la haute assemblée, et l’institution du referendum. C’était un bouleversement complet de la constitution ; mais tout ce bruit et les violens discours qui l’accompagnaient satisfaisaient le bonhomme Démos, qui n’a guère change depuis qu’Aristophane s’en moquait à Athènes. « Corps pourri et corrompu, vieux fossiles », tels étaient les termes donc se servait le premier ministre lui-même pour désigner la Chambre haute et ses membres. La période électorale terminée, il s’étonnait qu’ils en fussent mécontens et lui votassent un blâme pour ce qui n’était, disait-il, que election talk, des discours électoraux. La comédie finie, les acteurs étaient surpris qu’on vint leur reprocher à la ville ce qu’ils avaient dit sur les planches pour se faire applaudir du public.
Les méthodes de travail des parlemens australiens témoignent aussi du souci d’ostentation qui caractérise le monde politique de ces démocraties. La Nouvelle-Zélande se fait particulièrement remarquer à ce point de vue. Le premier ministre est ici un ancien cabaretier, qui, par une singulière ironie, se trouvait obligé, l’été dernier, de soutenir un projet de loi restreignant la vente des liqueurs alcooliques. Ce n’était qu’un des quatre-vingts et quelques bills que le Parlement devait discuter dans les trois derniers mois de sa session et qui avaient trait aux sujets les plus divers : divorce ; restriction de l’immigration, surtout de celle des Chinois ; questions ouvrières, agraires ; enfin question de la banque de la Nouvelle-Zélande, près de tomber en déconfiture sous l’exagération de ses prêts hypothécaires. Dans cette dernière discussion il y eut deux séances qui, commencées à 2 heures de l’après-midi se terminèrent l’une à 6, l’autre à 8 heures du matin : c’est dans ces conditions que fut votée une garantie de 80 millions de francs donnée par cette colonie dont le budget total ne dépasse guère 100 millions. Or, un an auparavant, le jeune et populaire ministre des finances avait déjà arraché à la Chambre, en une nuit, une première garantie de 50