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étrangères, et M. Luzzatti au Trésor. Ces deux derniers sont les plus connus au dehors, et particulièrement en France, où M. Luzzatti, économiste distingué, a beaucoup de relations et de sympathies.

Comme on le voit, on aurait tort de chercher dans la crise italienne et dans le dénouement qu’elle a eu des indications intéressantes au point de vue international. La politique intérieure y a seule été en jeu et M. di Rudini ne s’est pas proposé d’autre objet que de rectifier ses positions premières, soit à l’égard de la cour, soit à l’égard des divers partis. La déconvenue a été grande pour la gauche avancée, et elle le manifeste avec quelque amertume. Naturellement, les partisans de M. Crispi jettent feu et flammes, ce qui ne les change guère ; mais après tout ce qui s’est passé, la réconciliation entre M. Cavallotti et eux est, pour le moment, impossible. Il est d’ailleurs trop tôt pour apprécier exactement les conséquences de l’initiative, au total assez hardie, que vient de prendre M. di Rudini ; la seule qui paraisse probable, encore n’est-elle pas certaine, est que les élections générales en seront rapprochées. Il y a dans les esprits de la confusion, de l’hésitation. M. Giolitti et le groupe piémontais ne sont pas contens ; toutefois ils n’ont pas encore déclaré la guerre. M. Zanardelli se réserve, observe et se tait. Des groupemens nouveaux se préparent ; ils sont encore à l’état de nébuleuse. Tout porte à croire que M. di Rudini a, pour le moment, consolidé sa situation ; mais une grande incertitude pèse sur l’avenir.


Nous ne dirons qu’un mot des élections belges, qui ont fait couler presque autant d’encre en France qu’en Belgique. Les élections partielles, — il s’agissait de renouveler la moitié de la Chambre, — ont augmenté la majorité catholique déjà si considérable, et achevé la défaite, l’anéantissement des libéraux, déjà si maltraités aux élections dernières. Les libéraux n’étaient que dix à la Chambre, ils ne sont plus que quatre, mais ils peuvent dire : Tout est perdu, fors l’honneur ! La tentation a été grande pour eux, au scrutin de ballottage, d’apporter leur concours aux radicaux socialistes. M. Buis, bourgmestre de Bruxelles, leur en donnait le conseil. Le conseil de M. Buis n’a pas été suivi. Ce qui le rendait en quelque mesure excusable, c’est le vice d’une loi électorale qui établit le scrutin de liste dans des conditions telles que les catholiques obtiennent un représentant par 8 ou 9 000 suffrages émis, et les socialistes par 10 ou 12 000, tandis que les libéraux n’en ont un que par 50 000 suffrages. Il y a là une injustice criante, une véritable iniquité politique, et un pays soucieux du bon, nous dirons même de l’honnête fonctionnement de ses lois fondamentales, doit s’appliquer à la corriger. C’est pour protester contre cet état de choses que M. Buis conseillait aux libéraux de Bruxelles de s’allier avec les radicaux socialistes d’Anvers, et cette coalition, si la loi en était