300 francs en 1789 ; on a vu, dans l’article précédent, qu’elle avait valu le double au XVe siècle.
Cet avilissement des prix du travail, cette moindre récompense de l’effort humain, sous toutes ses formes, de 1500 à 1790, il serait intéressant, après l’avoir touché du doigt par le taux des salaires, d’en fournir une preuve nouvelle par la valeur des façons ouvrières. Non que je prétende englober sous cette rubrique tous les ouvrages imaginables, depuis le creusement d’une fosse au cimetière, qui coûte 12 centimes à Soissons, sous Louis XV, et depuis le cirage d’une paire de souliers que l’on paie 4 centimes aux décrotteurs de Rouen, jusqu’à la taille des diamans, pour laquelle le fameux joaillier Lopez donnait à son ouvrier 37 000 francs par an — un traitement d’ambassadeur — sous le ministère de Richelieu. Même bornées à des tâches assez simples, assez uniformes pour être exactement comparables à travers les temps et les lieux, nos visées sont cependant difficiles à satisfaire, parce que les travaux de ce genre sont rares.
Que dire par exemple de la façon des vêtemens, depuis le XIIIe siècle jusqu’au XVIIIe ; pour le peuple comme pour les grands, les costumes d’autrefois ne diffèrent-ils pas trop de ceux de l’ère moderne ? De petits bourgeois donnent, au XIVe siècle, de 3 à 6 francs pour la coupe et la couture d’un manteau ou d’une cotte ; à peu près autant, au XVe, pour le pourpoint, le justaucorps ou la « jaquette ». La façon des robes, pour les deux sexes, se paie aux mêmes époques de 5 à 11 francs, et jusqu’à 30 francs si elles sont un peu ornées. Celle d’un seigneur « à cinq garnimens » vaut 44 francs, celle de la comtesse d’Artois 130 francs, en 1328. À la même date la confection d’une « houppelande » ordinaire valait 36 francs ; celle d’une houppelande riche, destinée au roi, ()2 francs ; et celle d’un costume pour la reine, comprenant « chape — manteau long — surcot ouvert, surcot clos, mantel à parer et cotte simple » montait à la somme de 570 francs. C’était le temps où l’on disait « parée comme une reine. »
La façon d’une paire de chausses en drap, pour le roi, coûtait 11 francs, au XIVe siècle ; celle des chausses de laine pour un bourgeois 4 fr. 40, celle des chausses de toile, pour un paysan, 1 fr. 44. Au début du XVIIe siècle les chausses d’un prince ne valent que 6 fr. 40 de façon et celles des bourgeois que 2 francs. Celle des culottes du vulgaire ne se payait pas plus de 1 fr. 30 au moment de la Révolution, celle des culottes de peau 2 fr. 70. En 1790 on prenait à Paris 18 francs pour la façon d’un costume complet