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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 138.djvu/663

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par 1 hectare de betteraves intactes, il n’en recueille que 23 000 ; les premières renferment 13 centièmes de sucre, les secondes 10. Corenwinder trouve, une autre année, que l’effeuillaison diminue la récolte de racines de 14 000 kilos par hectare. J’ai moi-même procédé à l’effeuillage systématique des betteraves, et les résultats n’ont pas été moins déplorables que les précédens.

On ne saurait donc trop recommander aux paysans de laisser intact le feuillage de leurs betteraves ; les feuilles ne sont au reste que médiocrement nutritives, et la maigre ration qu’elles fournissent aux animaux pendant l’été, diminue considérablement celle qu’ils auraient reçue pendant l’hiver si on n’avait pas pratiqué l’effeuillage.

La feuille, nous l’avons dit plus haut, produit une matière sucrée, la glycose, qui n’est pas identique avec la saccharose, le sucre, que nous consommons couramment ; celui-ci se trouve dans la racine de la betterave comme dans la tige de la canne, de là son nom vulgaire de sucre de canne.

Il existe donc dans la feuille de la betterave et dans la racine deux sucres différens, l’analyse montre en outre que le jus de& feuilles est moins chargé, moins concentré, que celui de la racine. En examinant la racine de la betterave, en voyant les vaisseaux partant des feuilles s’y prolonger, on ne doute pas que la glycose des feuilles ne puisse descendre dans la racine ; on ne doute même pas que le sucre accumulé dans la racine ne tire son origine de la glycose élaborée par les feuilles, et cependant cette origine n’est pas encore complètement éclaircie.

Si nous transformons très aisément le sucre de canne en glycose, l’opération inverse n : a pas encore été réalisée ; toutefois les relations entre ces deux variétés de sucre sont tellement étroites qu’on peut suppléer à la défaillance de la synthèse et admettre qu’en pénétrant dans la cellule de la racine la glycose devient sucre de canne ; mais cette manière de voir étant acceptée, il restait encore à élucider une question qui a longtemps exercé la sagacité des physiologistes.

J’ai déjà indiqué dans un précédent article comment, en m’appuyant sur les phénomènes de diffusion, j’avais pu expliquer, il y a une trentaine d’années, l’accumulation dans un organe d’une substance qui y devient insoluble[1].

Mais si nous concevons aisément comment la fécule insoluble dans l’eau se rencontre en quantités notables dans les tubercules de la pomme de terre, nous n’avions aucune interprétation

  1. Voyez la Revue du 1er septembre 1895.