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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 138.djvu/670

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terre en bon état, fertilisée depuis longtemps, l’hésitation n’est pas possible, la betterave est infiniment supérieure, surtout dans les terres humides qui conviennent peu à la pomme de terre.

La betterave, il est vrai, entraîne une dépense de main-d’œuvre et d’engrais supérieure à celle qu’exige la pomme de terre, mais comme la betterave laisse le sol dans un état de fertilité infiniment supérieur à celui où il se trouve après l’arrachage des tubercules, il y a là une compensation dont il convient de tenir compte.

La betterave fourragère est donc parfaitement à sa place dans les terres arrivées à un haut degré de fertilité, et on pourrait obtenir un profit bien supérieur à celui qu’on en tire d’ordinaire si on s’astreignait à la cultiver en lignes serrées de façon à récolter des racines de petite dimension, riches en matières nutritives.

La consommation directe de la betterave par les animaux est-elle la meilleure méthode pour l’utiliser ? C’est là ce qui nous reste encore à discuter.


IV. — LA FABRICATION DE L’ALCOOL AVEC LA BETTERAVE DISTILLERIES AGRICOLES

Il y a cinquante ans, la quantité d’alcool enregistré par l’administration française n’atteignait guère que 900 000 hectolitres ; la fermentation de l’amidon, des substances farineuses ou du sucre des mélasses n’apportait à la masse qu’un faible contingent de 76 000 hectolitres ; la distillation du vin fournissait le reste, c’est-à-dire 824 000 hectolitres.

Tout changea quand, en 1850, la vigne fut atteinte par une des maladies qui successivement ont sévi sur elle et à plusieurs reprises ont failli détruire notre immense vignoble. Cette première attaque fut terrible, elle était duc à un champignon parasite : l’oïdium, dont les fines ramifications couvrent d’un réseau grisâtre les feuilles de la vigne, les grains des raisins, et les détruisent. On sut bientôt, grâce aux travaux de mon ancien confrère de l’Académie, M. Duchartre, que la fleur de soufre combat victorieusement l’oïdium, mais entre une découverte de laboratoire et son application à un vignoble d’énorme étendue, des années s’écoulent. En 1852, la production de l’alcool de vin tomba de 825 000 hectolitres à 76 000 ; les prix s’élevèrent prodigieusement, ils dépassèrent 200 francs l’hectolitre ; presque tout ce qu’on récolta de vin fut consommé en nature et il fallut trouver d’autres sources d’alcool ; on mit en œuvre des plantes ou des produits