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REVUE LITTÉRAIRE

AMOURS ROMANTIQUES

Il ne reste à faire paraître que les lettres de Musset : ce n’est plus, à l’heure qu’il est, qu’une question de temps, et de peu de temps. On les a jusqu’ici défendues contre les badauds et protégées contre la foule ; mais les résistances mollissent, les scrupules faiblissent, le moment approche. Déjà nous possédons des fragmens de ces lettres, nous en connaissons le ton et le sens, nous les lisons à travers les réponses ; et tant de renseignemens dont on nous inonde depuis six mois, tant de détails intimes, tant de témoignages à la fois abondans et précis, sont bien de nature à calmer la fièvre des plus impatiens. Que de lettres, que de journaux, que de confidences et de souvenirs, que de papiers de toutes sortes, jusqu’à des lettres d’Augustine Brohan et de Philarète Chasles, et jusqu’à des ordonnances médicales ! Quelle minutie et quelle patience dans l’investigation, quelle ingéniosité dans les commentaires, quel art de faire parler les gens, que de recherches, que de fouilles, que de voyages ! On admire ce que le souci de la vérité peut faire entreprendre à des historiens consciencieux. A quelle minute exacte une femme a-t-elle fermé sa porte à son amant ? ils le sauront, ou ils y mourront. Grâce aux efforts de ces chercheurs, — ils sont légion, — l’intimité des amans de Venise n’a plus pour nous de secrets : les volets sont ouverts et les rideaux écartés. Il n’y a qu’à prendre : on nous en donne jusque-là. Nous savons de quels outrages le dandy que fut Alfred de Musset poursuit sa maîtresse, et comment il lui reproche d’être malade, et languissante, et bête, et l’ennui personnifié, pour ne