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qui se sont dès ce moment précipités avec une rapidité et une intensité plus grandes, et lorsqu’il s’est agi de faire la paix, les puissances ont dû se préoccuper de régler et d’assurer la situation internationale de la Turquie au point de vue financier comme à tous les autres. Aussi dans le protocole 18, ou si l’on veut dans la 18e séance du Congrès de Berlin, le premier plénipotentiaire d’Italie, parlant au nom de ses collègues de France et de Grande-Bretagne en même temps qu’au sien propre, a-t-il soumis à ses collègues la déclaration suivante : « Les Puissances représentées au Congrès sont d’avis de recommander à la Sublime Porte l’institution à Constantinople d’une commission financière, composée d’hommes spéciaux, nommés par les gouvernemens respectifs, et qui serait chargée d’examiner les réclamations des porteurs de titres de la Dette ottomane, et de proposer les moyens les plus efficaces pour leur donner la satisfaction compatible avec la situation financière de la Sublime Porte. » C’est à cette déclaration que s’est reporté M. de Nélidof dans la note qu’il a remise au sultan, il y a quelques jours. Les six grandes puissances y avaient adhéré, soit l’Italie, l’Angleterre, la France, l’Autriche-Hongrie, la Russie et l’Allemagne. Seule la Porte, par l’organe de son principal représentant, Caratheodory-Pacha, avait déclaré ne pas l’accepter « dans les termes où elle était formulée », mais en ajoutant que son gouvernement donnerait tous ses soins à la question des finances. « C’est, disait-il, le devoir et l’intérêt de la Porte de faire tout le possible pour améliorer la situation », et, sans pouvoir préciser les conditions ou l’époque d’un accord, il avait donné au Congrès une indication précieuse, à savoir que les créanciers recherchaient une entente entre eux et le gouvernement ottoman, et que celui-ci s’efforcerait de les satisfaire dans la mesure de ses ressources. L’incident a été reproduit tel quel dans le protocole 18, le prince de Bismarck, président, ayant décidé que la déclaration du comte Corti devait y être insérée et que le Congrès en prenait acte.

Ainsi, les grandes puissances recommandaient à la Porte l’institution à Constantinople d’une commission financière dont les membres seraient nommés par leurs gouvernemens respectifs. C’est à cette dernière obligation que le gouvernement ottoman a cherché à se soustraire, de la manière la plus légitime d’ailleurs, c’est-à-dire par une entente directe avec ses créanciers. L’Europe est restée spectatrice attentive des négociations, se réservant, si elles échouaient, de reprendre la déclaration du protocole 18 et d’en exiger la stricte exécution, ou au contraire de laisser dormir cette déclaration et de la mettre en quelque sorte en réserve jusqu’à nouvel ordre, si une entente amiable venait à