l’œuvre d’un homme de lettres équivoque, mais traduisait fidèlement les revendications et les pensées intimes de l’oligarchie foncière[1].
Au milieu de phrases sur l’intérêt national, que dictait à Marwitz son patriotisme sincère et le souvenir encore récent des désastres de 1806, on sent percer le plus singulier esprit provincial. La province est une personne morale qui traite avec le monarque, un État dans l’État; et, si l’idée de l’intérêt national n’est pas absente, elle est du moins complètement subordonnée. Les vrais griefs de Marwitz et de ses compagnons, on le sent et il >en livre lui-même le secret dans ses mémoires, c’est qu’on a mis la main sur la caisse provinciale, cette propriété des États du Brandebourg, c’est qu’on ne respecte plus l’indépendance et l’individualité de la Marche.
Il y a toutefois dans le manifeste des États du Brandebourg autre chose que cette étroitesse provinciale. On y trouve l’exposé très clair des théories politiques du parti féodal. La législation fiscale de Hardenberg, les édits rendus sans que les États provinciaux aient été consultés, sont pour Marwitz et ses co-signataires un pur et simple coup d’État.
Rien ne peut être décidé ou projeté, en toute matière qui intéresse la prospérité ou le déclin du pays, sans la connaissance, le conseil et le consentement des États provinciaux du royaume formés par l’association traditionnelle des villes et des possesseurs nobles de biens nobles.
Cela est écrit dans chacun de ces contrats, de ces traités que le monarque a passés, en 1653 notamment, avec la noblesse de ses provinces, et qui sont, pour ces hobereaux, la seule forme valable de la législation prussienne, la constitution même du royaume.
Marwitz cède à la force, mais il proteste pour lui et pour sa descendance à perpétuité. Il est bien convaincu qu’il n’y a pas d’autre loi dans le royaume que celle qui résulte de ces contrats passés entre le monarque et la noblesse des diverses provinces, traitant de puissance à puissance.
Toute platonique que fût la rébellion, ce n’en était pas moins une attaque directe à l’autorité du roi. L’on envoya Marwitz et
- ↑ Treitschke, Deutsche Geschichte, I, p. 373, Adresse remise au roi le 24 janvier 1811. Adresse remise à Hardenberg le 30 janvier 1811. Aus dem Nachllasse Friedrich August Ludwig’s von der Marwitz, I. Lebensbeschreibung, p. 313.