bien, comme l’a plus tard affirmé Monti, d’une entreprise essentiellement politique, sous ses dehors de pure littérature, et d’une entreprise où des écrivains italiens auraient certes mieux fait de ne pas s’associer. Mais le plus curieux est que ni Acerbi, ni aucun de ses collaborateurs, ne s’y est d’abord associé avec autant d’entrain que le patriote Monti. Ses lettres à Acerbi débordent d’enthousiasme pour la revue projetée. Il signale des sujets d’articles, désigne des collaborateurs possibles, voire même des abonnés. C’est lui qui fait nommer au comité de rédaction, en remplacement de Mengotti, l’ex-frère Giordani, qui deviendra bientôt son second dans sa lutte contre Acerbi, et que, pour le moment, il recommande à celui-ci, tout en reconnaissant « qu’il a un triste caractère. » Et non seulement Monti et Giordani, mais tous les écrivains italiens, ou à peu près, répondent avec empressement à l’appel d’Acerbi. Seul Manzoni refuse de collaborer à la nouvelle revue, « s’étant fait une loi de ne jamais entrer dans aucune association littéraire. » Tous les autres acceptent, demandent à écrire dans la première livraison, et proposent des sujets d’articles en nombre infini. Silvio Pellico, par exemple, écrit à Acerbi qu’il « sent tout le prix de l’honneur qui lui est fait, et qu’il sera trop heureux de pouvoir contribuer à répandre en Italie le culte des lumières. » Et en effet il donne à la Biblioteca Italiana, en mars 1817, un article sur une Nouvelle Méthode de préparer la soie.
Cet empressement unanime des auteurs italiens paraîtra moins étonnant quand nous aurons ajouté que la Biblioteca Italiana s’engageait à payer tous ses collaborateurs. C’était là, comme l’écrivait Acerbi dans une lettre à son ami Carpani, « une révolution dans le journalisme de la péninsule. » Loin de payer les écrivains, journaux et revues avaient eu l’habitude, jusque-là, de s’en faire payer pour insérer leurs articles. Et voici qu’on leur offrait, de la façon la plus formelle et la plus régulière, avec garantie du gouvernement, un prix fixe de quarante francs par feuille d’imprimé !
L’idée première de cette « révolution » ne venait pas en vérité d’Acerbi, mais du baron Sardagna, qui semble d’ailleurs avoir été, lui aussi, un homme intelligent et plein d’idées ingénieuses. Il aurait voulu, également, que la Biblioteca Italiana s’abstint de publier des « mémoires originaux » ; et ce vœu peut paraître étrange au premier abord ; mais M. Luzio, qui ne le signale que pour s’en moquer, est lui-même forcé d’avouer, quelques pages plus loin, que l’excès de « mémoires originaux » a été le principal obstacle au succès de la revue auprès du grand public. Tandis que Silvio Pellico décrivait une nouvelle