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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars.

On croyait l’affaire de Panama terminée ; elle recommence. Arton a été arrêté il y a longtemps déjà : c’était sous le ministère radical de M. Bourgeois. Depuis lors il n’avait rien dit, et l’attention publique qui s’était d’abord fixée sur lui avec intensité s’en était peu à peu détournée. Pourquoi Arton s’est-il tu pendant plus d’une année, et pourquoi a-t-il parlé aujourd’hui ? C’est un acteur habile qui ménage ses effets et leur donne du prix en les faisant attendre. Depuis trois semaines, on ne parle que de lui. Il fait des révélations. Il dresse des accusations. Il fournit des documens, ou du moins il indique au juge d’instruction l’endroit où celui-ci les trouvera ; et M. Le Poittevin passe aussitôt la Manche et revient d’Angleterre avec un carnet. Ce carnet, d’ailleurs, ne dit rien de nouveau : il reproduit simplement ce que contenait un autre, qui était déjà connu. On n’a pas une seconde preuve, mais on a deux fois la même, ce qui a paru beaucoup plus probant. Si Arton avait fait un troisième, un quatrième carnet où il aurait répété la même chose, et si le juge d’instruction avait dû aller les chercher en Italie, ou en Roumanie, enfin dans toutes les contrées qu’Arton a successivement traversées, on voit tout de suite que la preuve serait devenue certaine. On reconnaît qu’elle ne l’est pas encore tout à fait aujourd’hui. Elle n’a pris corps qu’en ce qui concerne trois députés et un sénateur, au sujet desquels M. le garde des sceaux, à titre d’intermédiaire entre le procureur général et le parlement, a demandé la suspension de l’immunité parlementaire. La Chambre a aussitôt nommé une commission, et la commission a mis moins de temps encore à réclamer tout le dossier de l’instruction. On ne lui en a communiqué qu’une partie ; mais elle a eu entre les mains tous les carnets, toutes les listes d’Arton, et le