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lui-même et libre de traiter à sa guise un sujet moins ingrat, il n’y eût pas si largement recouru. Son désir extrême de peindre la galerie d’Henri IV, dont la matière lui semblait « généreuse et abondante », montre assez sur quel dédommagement il comptait en s’inspirant d’une vie bien autrement riche en événemens. Malheureusement le projet primitivement arrêté, après avoir subi bien des retards et causé bien des ennuis à Rubens, ne devait pas aboutir. A voir le peu d’empressement du cardinal de Richelieu à approuver le programme qui lui était soumis, Rubens avait, dès son séjour à Paris, conçu quelque crainte à cet égard. Cependant, malgré la vie très occupée qui l’attendait à Anvers, il ne laissait pas de poursuivre cette affaire en écrivant lettres sur lettres à ses amis. En dépit de ces instances, le temps se passait sans qu’il fût avisé d’aucune décision positive et ce n’est guère qu’au début de l’année 1628 que les choses avaient semblé prendre pour lui une meilleure tournure. A la date du 27 janvier, il écrivait, en effet, à Pierre Dupuy, avec lequel, en l’absence de Peiresc, il échangeait une correspondance régulière : « J’ai commencé les esquisses de l’autre galerie qui, grâce à la qualité des sujets, sera, à mon avis, plus magnifique que la première, de façon que j’espère ainsi avoir été en progressant plutôt qu’en reculant. Dieu me donne seulement vie et santé pour mener ce travail à bonne fin et puisse-t-il aussi accorder à la reine mère de jouir longtemps encore de son Palais d’or! » Mais l’artiste lui-même devait être retardé dans ce travail par les séjours qu’il était obligé de faire en Espagne et en Angleterre, du mois d’août 1628 jusqu’au 6 mars 1630, à raison des missions diplomatiques dont il était chargé dans ces deux pays. Cette absence prolongée fournissait au cardinal de Richelieu, qui n’avait jamais été bien disposé en sa faveur, l’occasion de revenir à la charge près de Marie de Médicis pour la prier de confier « à Josépin d’Arpino qui ne désirait, dit-il, que d’avoir l’honneur de la servir, le soin d’entreprendre et de parachever cet ouvrage, pour le prix que Rubens a eu de l’autre galerie qu’il a peinte[1]. » Après avoir demandé au cardinal Spada quels artistes italiens seraient capables de s’acquitter d’une pareille tâche, la reine, un moment ébranlée, avait maintenu la commande à Rubens. Mais celui-ci n’était pas au bout de ses peines. Les mesures qui lui avaient été d’abord transmises ayant

  1. Lettre du 22 avril 1629