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Leur politique, si c’en est une, c’est ce que nous avons appelé la politique populaire, par opposition à la politique officielle. C’est elle, aigrie, exaspérée par un demi-siècle d’efforts jusqu’ici inutiles; mais c’est elle, suivie, identique à elle-même, obstinée et tenace, et comme serrant Cuba d’une prise qui ne veut pas lâcher


III

Le gouvernement fédéral n’y peut rien : ou, ce qu’il y pouvait, il n’a pas négligé de le faire. Il a empêché que ses troupes, revenant du Mexique, ne tentassent une descente dans l’île ; il a laissé passer, dans l’affaire des compagnons de Lopez, la dure justice de la guerre ; il a, sous le Président Pierce et le secrétaire d’Etat Marcy, licencié l’expédition de Quitman ; il a jadis réglé à l’amiable l’incident du Virginius ; il a tout récemment repoussé de son veto les motions trop inconsidérées, par où la politique populaire se faisait jour dans le Congrès, et qui proposaient de reconnaître les unes, l’indépendance de Cuba et les autres, du moins la belligérance aux Cubains ; il a donné au Laurada l’ordre de ne pas faire à Valence un voyage qui passerait en Espagne pour une provocation ; il a cité devant les tribunaux les armateurs et le commandant du Three Friends; il a soumis à une surveillance qui a paru sévère les bâtimens soupçonnés de flibusterie. Les lois ne lui permettaient guère d’aller au delà.

M. Canovas le proclame hautement : ni de l’ancien président, M. Cleveland, ni de son secrétaire d’État, M. Olney, ni de leur ministre à Madrid, M. Hannis Taylor, il n’a jamais eu à se plaindre : avec eux et en eux a continué la tradition parfaitement correcte, selon les règles et dans les formes, de la politique officielle de l’Union; tradition fondée depuis que le département américain des affaires étrangères a été amené à s’occuper de Cuba. Mais, de ce que cette politique officielle observe les règles et les formes, de ce qu’elle est plus discrète que l’autre, il ne résulte à aucun degré que le gouvernement des Etats-Unis n’ait point une politique cubaine; il en a une assurément, et qui, moins bruyante en ses manifestations, moins violente en ses actes, n’est pas moins ferme en ses desseins ni moins persévérante en ses démarches.

Comme la politique populaire, elle repose sur la loi, tenue pour certaine, de M. Adams : à savoir que Cuba est un corps qui ne peut manquer, quand il tombera, de tomber dans l’Union